Marché du poker : Taxer moins pour gagner plus

Marché du poker : Taxer moins pour gagner plus

Selon une étude italienne, plus l'Etat taxe, plus les joueurs fuient le marché et moins l'Etat gagne, in fine. Devinez quel pays d'Europe taxe le plus le poker et pourrait (devrait  ?) s'inspirer de cette étude ?

Le niveau des taxes en Europe

En France, depuis l’ouverture du marché en 2010, l’Etat prélève directement 2% de chaque mise.

Précisons que cette taxe inclus les pots sans flop. Les rooms françaises, qui ont instauré un no flop no drop à la suite d’un mouvement de grève des joueurs, perdent donc de l’argent à chaque pot terminé préflop.

A l’étranger, les Etats européens prélève un pourcentage du Produit Brut des Jeux (PBJ) c'est à dire le total du rake que touchent les rooms (rakeback déduit).

Une fois les 2% des mises convertis en pourcentage du PBJ, nous pouvons donc comparer la France avec les autres pays de l’Europe. Ô, surprise, la France est le pays qui taxe le plus le poker !

 

France

Italie

Espagne

Danemark

Royaume Uni

Malte

Tournois

25%

27,3%

25%

20%

15%

5%

Cash Game

37%

20%

25%

20%

15%

5%

Fiscalité des jeux : quand la banque perd

“Fiscalité des jeux, quand la banque perd”, tel est l’intitulé de la récente étude de l’Institut Bruno Leoni sur le poker (pdf).

Pour mieux comprendre ce titre, rappelons qu’en France les rooms de poker ont perdu 88 Millions d’euros en 2011 et 68 Millions d’euros en 2012 (entraînant au passage nombre de fermetures).

Concrètement, l’Etude explique que, plus les taxes augmentent, plus le rake augmente ; plus le rake augmente, moins les joueurs jouent ; moins les joueurs jouent, plus le montant des taxes diminue.
En augmentant le pourcentage des taxes sur le poker, les Etats font finalement diminuer le montant de ces prélèvements…
NB : ce cercle vicieux n'est pas exhaustif, citons comme autre effet malsain le manque d'argent à investir en publicité, qui entraîne un non renouvellement des joueurs...

L’étude suggère donc, afin de rapatrier les ex joueurs et joueurs illégaux vers l’offre légale, de diminuer le pourcentage de taxes étatiques. L’augmentation du trafic qui en résulterait aboutirait à une augmentation du total des prélèvements. Une stratégie gagnante-gagnante donc.

La France peut-elle changer la fiscalité du poker ?

Pour prédire le futur, regardons le passé : En 2010, le marché des jeux en ligne s’ouvre en France. Les sites de poker sont taxés à 2% des mises, qu’elles soient préflop ou post flop. En conséquence, les rooms augmentent le rake post flop (qui passe d’environ 5% à 7%) et instaurent un rake préflop de 2% là où il n’y en avait pas.

Mais les joueurs grondent et certains se mettent en grève, faisant capituler les rooms qui rétablissent le “no flop, no drop”.
Ainsi, les rooms perdent de l’argent sur chaque pot terminé préflop, contribuant à la baisse du marché.

Le député Jean François Lamour se saisit du problème et propose un amendement visant à taxer le PBJ et non plus les mises. Ce qui devrait faire plaisir aux rooms leur fait peur : Lamour demande à ce que les rooms reversent plus de 45% de leur PBJ, soit plus que ce qu’elles donnent avec la taxe à 2% des mises. L’amendement sera finalement rejeté par le gouvernement…

La seule tentative de taxer le PBJ s’est donc soldée par un échec. A l’époque, la droite était au pouvoir. La gauche peut-elle comprendre que baisser la fiscalité du poker puisse être une stratégie gagnante à long terme pour l’Etat ? Les paris sont ouverts, mais la cote du oui est grande…

Le fatalisme de l’Arjel : “la mode du poker est passée”

Lors d’une interview au journal Les Echos, sa première en tant que président de l’Arjel, Charles Coppolani déclara à propos du poker “L'effet de mode est passé. Au fond, le marché du poker en ligne est peut-être arrivé à maturité.”

Cette phrase est une description assez juste, bien que déprimante, de la situation.
Partant de ce constat, on pouvait espérer que Coppolani, en tant que principal interlocuteur du gouvernement pour le poker, plaide en faveur d’une baisse des taxes, qui serait profitable à tous, comme expliqué plus haut, mais aussi pour une mise en commun du marché avec nos voisins italiens et espagnols et pour l’implantation de nouvelles variantes.

Un discours “ça va mal à cause de notre politique depuis la régulation, changeons de politique” était ce qu’avaient envie d’entendre tous les acteurs du poker.

Las, quand on lui demanda les priorités de son mandat, le président de l’Arjel répondit :
“La protection des joueurs est une priorité permanente. A ce titre, nous réfléchissons à la mise en oeuvre d'indicateurs avancés de l'addiction. Nous devons par ailleurs être en mesure de surveiller les paris à l'étranger sur les compétitions françaises. On surveille l'activité en France mais nous n'avons aucune visibilité sur ce qui se passe en dehors. Par ailleurs, nous allons travailler main dans la main avec la Française des Jeux. La lutte contre l'illégalité est un combat sans fin. Nous surveillons 2.800 sites en permanence. L'an dernier, 1.021 ont été mis en demeure et 65 ont été « déconnectés » après saisine du tribunal de grande d'instance de Paris et action auprès des fournisseurs d'accès à Internet. Nous avons d'ailleurs encore saisi le TGI ces dernières semaines. Je crois aussi nécessaire de développer la recherche en France autour du jeu, et ce dans toutes ses dimensions. L'Arjel va travailler avec des universités.”

Comprenez : aucun changement prévu à l’horizon…

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