Trois situations où vous devriez check/raise plus souvent

Trois situations où vous devriez check/raise plus souvent

Le constat de Freudinou est sans appel : Les joueurs ont tendance à ne pas check/raise suffisamment. Le coach Poker Académie vous présente trois spots précis où l'utilisation de ce move peut s'avérer diablement efficace.


3 bons spots de check/raise

Le check/raise est un move dont on parle souvent mais que l’on pratique plus rarement si on en croit les chiffres. De mon expérience de coach, la statistique de check/raise plafonne souvent à 4 % chez les joueurs de micro-limites et ce n’est pas toujours mieux aux limites supérieures. C’est pourquoi aujourd’hui je vous propose quelques idées afin de placer ce spew, pardon, ce move qui est parfois désagréable pour celui qui le fait mais l’est tout autant pour celui qui le subit.


1. Sur un board dry face à une range linéaire

Après avoir remporté un abonnement premium sur un Stream de Poker Académie en répondant à la question « Est-ce qu’un 3 bet est plus fort qu’un 2 bet ? », vous voici arrivé en NL 100. Vous êtes en big blind et le bouton ouvre à 2,25 €. Vous payez avec tout en justifiant dans votre tête « C’est GTO… ».

Le flop vient et le pot fait 5 €. Vous checkez et votre adversaire mise 1,7 €, soit environ un tiers du pot. Ici, vous êtes dans une situation embarrassante avec votre main et de manière générale avec votre range de Big blind. Devant cette mise, vous allez devoir défendre de très nombreuses mains de votre range sous peine de voir l’adversaire faire un profit immédiat. Vous entrevoyez le potentiel de votre qui peut jouer deux backdoors : quinte et couleur. Ce qui vous donne fortement envie de payer. Ceci étant, vous comprenez également que cela reste assez désagréable à jouer, il vous faut toucher l’un de vos backdoors à la turn, ce qui ne garanti nullement de remporter le coup face à une range qui deviendra potentiellement de plus en plus forte si elle continue à miser. C’est alors que vous avez une idée de génie, probablement inspirée par un éminent coach : le check/raise !

Mettons-nous à la place de votre adversaire si vous relancez à 5,1 €, soit trois fois le montant. Sur ce board où il a misé 1 tiers du pot, il est probable qu’il mise une range linéaire…très linéaire. Autrement dit, tout ce qui a touché de prêt ou de loin (du brelan à la lointaine backdoor) va se retrouver souvent dans sa range de bet. Il misera à une fréquence avoisinant sûrement les 60/70 %. Une telle range va se retrouver en difficulté face à un check/raise car elle va être sommée à son tour de défendre une portion significative sous peine d’être exploitée alors qu’elle n’est objectivement pas si forte. Il est donc probable qu’ici vous fassiez souvent un profit immédiat en relançant avec comme bonus de voler l’équité de nombreuses mains qui auraient pu vous poser problème par la suite. A la turn, vous prévoyez de miser les cartes qui améliorent votre main, n’hésitez pas parfois à mettre des sizings de bûcheron, pourquoi pas pot. Sortez votre adversaire de sa zone de confort (certes, je vous le concède, les fois où il relance votre tirage et que vous n’avez pas la cote pour payer, vous n’allez pas être content du tout et me maudire…).

L’histoire n’est pas finie car la critique qu’on pourrait faire, c’est que rapidement votre opposant pourrait se rendre compte de votre subterfuge. Surtout qu’à priori vous n’avez pas intérêt à relancer vos bonnes mains ici car comme cela est enseigné à l’école classique du poker, « on va chasser tous les bluffs en relançant ». Vraiment ?

Effectivement, c’est ce que j’ai appris à cette vielle école. Dans cette configuration, relancer un , c’est mal. Pourquoi chasser une main comme A5o ou T9s qui pourrait continuer l’action à la turn et s’empaler contre notre main ? L’argument est bien entendu recevable mais voyons les choses autrement. Sur notre relance, sachez que si nous synthétisons, notre adversaire va au minimum devoir payer absolument toutes ses paires ou mieux ainsi que quelques hauteurs As comme AQ. Une portion non négligeable et désagréable à défendre. Sachez que face à une telle range, sera largement favori avec une équité avoisinant les 70 %. Si votre adversaire refuse de jouer le jeu (et donc de devenir exploitable sur vos bluffs…) en ne payant que des paires comme un 7 ou mieux, vous serez encore favori avec plus de 60 % d’équité une fois payé…La  question est donc la suivante : est-il plus intéressant de prendre des potentielles mises en bluffs futures dans un petit pot en payant simplement au flop ou bien faire grossir le pot immédiatement avec une main largement favorite ? Je vous laisse juger mais c’est une idée à creuser à mon sens. 

En résumé, voici le deal que nous proposons à notre adversaire « Mec, soit tu payes suffisamment de mains sur mon raise et moi je reste calme. Je vais juste value tranquillement mes meilleures mains et mettre quelques bluffs discretos. Du coup, toi tu perds une bonne partie de ton tapis quand j’ai un truc mais moi de mon côté je ne vais pas t’agresser souvent. Soit tu foldes beaucoup parce que t’as la flemme de perdre la moitié de ton stack contre mon KJs. Dans ce cas ok, je ne vais pas beaucoup gagner avec mes bonnes mains mais par contre, vu que tu foldes comme un ouf, je vais juste me mettre à bluffer en check/raise comme pas possible. Your choice bro ! »

Petite astuce à la turn : la mise à un tiers du pot qui obligera votre adversaire à continuer de payer large et vous permettra donc de continuer à value. Vous pourrez également le faire en semi-bluff avec un très bon tirage (12 outs ou plus) qui n’aura pas besoin de beaucoup de fold equity pour être rentable.

Les limites de la stratégie : il est certain que check/raise nos meilleures mains affaiblit encore notre range de check/call, aussi il faudra vous assurer que vous gardez suffisamment de mains pour défendre raisonnablement en call. C’est pourquoi je déconseille fortement de check/raise toutes vos bonnes mains mais plutôt de mixer vos stratégies. Autrement dit dans ce coup précis, de ne pas check/raise forcément tous vos KJ mais d’en garder une partie pour check/call.


2. Après une ligne de Bet / Check / bet

Je vous propose une main qui m’a mis dans l’embarras lors d’un de mes streams sur la chaîne Twitch de Poker Académie. Nous sommes en NL 10 sur une table de Zoom. Nous ouvrons à 2,5 bb au Bouton avec , payé par la Big blind, un joueur qui semble serré et passif. Sur 150 mains, il joue avec un VPIP de 19 et un PFR de 17. Ses AF (Agression Factor) et AFq (Agression frequency) sont respectivement de 1 et 31 %, bien en dessous des normes ce qui dénote une certaine passivité. 

Le flop est   et le pot fait 5,5 bb. Je mise en continuation bet à 3,6 bb et le joueur paye.

La turn est le  et le pot fait 12,7 bb. Le joueur check et je décide de faire un check discutable, sûrement plus occupé à ambiancer le tchat ou à parler une énième fois de mon amour des kangourous (un très noble animal bien que pas fini à tous les étages m’a-t-on appris). Ceci étant, à ma décharge, c’est probablement l’option qu’aurait pris PIO Solver…(je fais semblant, j’ai vérifié bien sûr…).

La river est une . La BB check de nouveau et je décide de me ressaisir en misant 8,4 bb avec pour seule angoisse que le joueur fold une main moyenne sur ce sizing qui me semble un peu cher (mais bon encore une fois, c’est un sizing PIO alors…). C’est alors qu’il dissipe mes craintes…en relançant à 34 bb !

Je me retrouve d’un coup face à une relance inattendue et je dois prendre ma décision en 30 secondes. Voyons les pour et les contres concernant la possibilité de payer.

Les pour :

  • J’ai besoin de gagner 32 % du temps pour payer.
     
  • Je représente exactement ma main. En effet, après mon check turn, il est évident que je n’ai pas un monstre sauf miracle river, comme un QQ/Q9s qui touche ses 2 outs et que j’aurais misé avec un si gros sizing au flop…Dès lors, un joueur qui lit le jeu pourrait avoir l’idée de me bluffer.
     
  • Il est difficile de voir l’énorme main qu’il peut avoir, généralement les joueurs vont assurer dans cette ligne avec une mise river s’ils ont un bon jeu.
     
  • Je bloque JT/KQ.
     
  • Le joueur renvoie l’image d’un joueur nit mais 150 mains, ce n’est pas un échantillon si grand. De plus, il ne faut jamais oublier qu’il y a un humain derrière ce pseudo qui a le droit de réfléchir.


Les contres

  • Même si les stats peuvent ne pas avoir convergée…il n’empêche que 150 mains constitue déjà un échantillon valable et pour le moment, tout indique qu’il est serré passif.
     
  • Les check/raise river en bluff en NL 10 sont extrêmement rares. Ils le sont déjà en value. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder un peu les statistiques des joueurs sur cette ligne qui plafonne bien souvent à 1 %...
     
  • En format Zoom, les joueurs sont généralement encore plus passif…

 

Il y a plus d’arguments pour le call, ceci étant, il ne faut pas toujours se laisser convaincre par le nombre d’arguments au poker et ne pas oublier le poids de chacun. Je décide que le poids des contres est le plus important et je décide de folder…avec le désagréable sentiment de m’être fait own comme on dit…

J’ose prétentieusement penser que si ce coup m’a mis dans l’embarras, il en mettra d’autres que moi et vous pourrez potentiellement les faire folder si vous êtes à la place de mon adversaire. Des mains comme J9s/TT avec des bloqueurs sur les nuts semble être des bonnes candidates à check/raise.

L’idée directrice étant que votre adversaire a souvent une main moyenne dans ce spot, autrement dit rarement mieux que top paire et nous essayons de la faire folder. Une stratégie évidemment complexe où chaque détail à son importance. Par exemple, évitez de le faire si vous savez que sur 100 mains votre adversaire a comme information que vous êtes 35/28 avec 3 d’AF…Ciblez également les joueurs qui sont plus venus faire du volume en enchaînant les mains frénétiquement que des regs venus se battre dans chaque pot. Sans quoi, ne vous étonnez pas comme moi de voir votre immense mise river se faire payer par un joueur après avoir utilisé tout son time bank malgré vos beaux bloqueurs…

 

3. En Pot 3Bet sur unr un Low Board

Récemment, plusieurs personnes m’ont rappelé que je perdais dans mon jeu un move assez ancien et important dans les pots 3bet : le check/raise sur des textures basses voire mediums. Prenons un exemple : nous sommes en Small blind et nous ouvrons à 3 bb. La big blind, un régulier agressif nous 3bet à 9 bb et nous payons. Le flop est et le pot fait 18 bb. Nous décidons de checker et l’adversaire fait une mise de continuation bet à 6 bb. 

Une action qui nous met souvent dans l’embarras. Sur ce petit sizing, nous devons défendre beaucoup de mains pour ne pas être exploité. D’un autre côté, le board va probablement évoluer et il nous sera compliqué de supporter l’agression. Même des mains comme TT/99 vont avoir les pires peines du monde à arriver à l’abattage face à un joueur agressif.

Quand l’adversaire mise 1 tiers du pot, à l’instar de nombreux joueur du .fr, il va avoir tendance à miser tout ce qui a un peu de potentiel en plus de ses bonnes mains. Les tirages ainsi que des backdoors. Ce qui représente une nouvelle fois beaucoup de mains et une nouvelle fois, si nous relançons, nombreuses de ces mains vont se retrouver en difficulté. En effet, sur le papier, payer des backdoors ou des belles overcards à potentiel est sûrement facile, un peu moins en pratique.


Quelles mains pourrions-nous check/raise ?

  • En bluff, il est intéressant de check/raise des mains comme A5s/A3s. Moins commun, une main comme Ac Jc. En effet, sachez que cette main a souvent pas loin de 40 % d’équité face à la range adverse. Néanmoins, la check/call peut s’avérer très délicat. Elle va donc se comporter tout simplement comme un semi-bluff avec quelques cartes à miser turn qui lui apporteront de l’équité.
     
  • En value, bien entendu des nuts comme 88/44/22 mais il faut voir qu’il y a un certain intérêt à relancer des mains comme TT/99. D’un strict point de vue des équités, si l’adversaire paye large pour ne pas être exploité, nous sommes devant une fois payés. Il faut voir également que malgré leur équité avoisinant souvent les 60 %, ces mains ont les pires peines du monde à arriver à l’abattage vivantes en raison de runnouts souvent déplaisants. Faire folder une main comme Kc Qc est loin d’être négligeable par exemple. En fait, de manière générale, soit l’adversaire fold souvent et nous allons l’empêcher de réaliser l’équité de nombreuses mains (deny equity), soit il paye beaucoup et nous restons en value. Je ne vais pas vous mentir, parfois le remède sera pire que le mal, par exemple si vous avez 99 et que votre adversaire pousse ton tapis, le mal de crâne est assuré mais c’est un parfois en se creusant un peu la tête qu’on trouve la solution pour transmettre à notre opposant notre mal de tête.

 

Un petit mot sur ces sources d’inspirations, comme souvent, n’abusez pas des bonnes idées au poker. De même, si vos premiers essais ne sont pas concluants, n’abandonnez pas, étudiez vos mains et demandez-vous ce que vous pouvez améliorer, ce qui est à jeter et ce qui est à garder. L’erreur est nécessaire pour progresser et n’oubliez jamais que pour cela, il est toujours important de savoir sortir de votre zone de confort.
 

 

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Présentation de Freudinou


Joueur de poker professionnel et coach sur Poker Académie depuis 2013, Freudinou a coaché à ce jour plus de 150 joueurs dont certains sont aujourd’hui professionnels. Il peut coacher des joueurs jusqu’en NL 30, son approche se veut construite et organisée. Psychologue de formation, l’aspect mental du jeu, encore bien souvent négligé, fait partie intégrante de ses coachings. Il a également une bonne maîtrise des logiciels poker (Trackers, Flopzilla, PIO Solver…). Pour plus d'informations, cliquer sur sa fiche coach.

 

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