L’écran devant lequel je suis assis depuis deux heures maintenant illumine d’une lumière blafarde la pénombre triste dans laquelle, ce soir, je suis assis. Des cartes que je lis à demi conscient y défilent d’un rythme constant entretenant la léthargie cérébrale dans laquelle volontairement je me plonge. Des boutons sur lesquels je clique trop mécaniquement répondent aux ordres que, sans conviction, je donne. Le jeu qui, voici peu, me gardait si alerte, si concentré me semble ce soir si lent, si passif, si peu enthousiasmant. Les fautes grossières des « fishs » du vendredi s’étant imbibés plus tôt dans la soirée ne m’arrachent pas même un sourire…
Une main, une Dame, un Roi de cœur, apparaissent, me sortent un peu de l’hypnose d’où ma tristesse m’a fait tomber. Je pense à nous, je pense à toi surtout. Je revis ta main si fine qui sur la mienne se ferme, les regards si amoureux que tu me lançes, les sentiments si forts que tu me portes, les mots si doux que je te murmure, les baisers si câlins que je t’offre, les caresses si tendres dont tu me régales. Lorsque trois cœurs se dévoilent bien que l’As adverse menace, le flop est simplement magique à l’image de ces moments passés ensemble par tant de complicité. Nous sommes si bien assortis à deux, presque invincibles à deux, quasi inséparables tous deux. Si je gagne pourtant, ma main dans la tienne, un joli pot, cela ne me ranime pas.
Pourquoi suis-je planté devant cet écran, vitrine d’un ailleurs virtuel ? Pourquoi suis-je assis à 4 tables, réceptacles de ma pesante mélancolie ? Est-ce vraiment pour ce jeu qui m’est si fade aujourd’hui ?
J’attends, j’attends et j’attends qu’une petite fenêtre de mon MSN « pop » sur cet écran. Pourtant, je sais que rien n’apparaitra ce soir, ni demain, ni plus loin. Ce soir, c’est le premier soir où tu es partie. Ce n’est pas de la variance, c’est une erreur de jeu.
Je t’aime tant. Tu me manques tant. Je ne saurai t’oublier puisqu’à jamais tu es ma pocket paire.
Dédicacé à ma moitié.