News exclusive : Non, on a pas une chance sur deux de gagner un coin flip !!!

News exclusive : Non, on a pas une chance sur deux de gagner un coin flip !!!

Sans forcément le savoir, la plupart du temps quand vous veniez d’avoir gagné un coin flip, vous avez perdu le suivant. Le poker est-il rigged ?


Dans cet article : loi des séries et poker, je vous présentais l’erreur de Monte Carlo (le biais qui nous pousse à croire que si la roulette s’arrête sur rouge elle a plus de chance de tomber sur noir ensuite, pour compenser) ainsi que l’illusion de la main chaude (le biais inverse : croire qu’un évènement aléatoire a plus de chance de se reproduire car il vient de se produire). C’est sur ce deuxième biais que nous allons revenir aujourd’hui.

Coin flips et pourcentage

Considérons que vous jouiez 3 coin flips à la suite. Combien de pourcents du temps un gain a été suivi par un autre gain ? 

Notons G un flip gagné et P un flip perdu. Dans GGG, un gain a été suivi par un gain 100% du temps. Dans GGP un gain a été suivi par un gain 50% du temps. Dans GPG un gain a été suivi par un gain 0% du temps. Etc. Pour trois flips, il y a 8 possibilités équiprobables de résultats.
Quelle est la moyenne de ces pourcentages ? Considérons maintenant que vous jouiez 4 flips à la suite, même question, combien de pourcents du temps un gain a été suivi par un gain ?

“Facile, allez-vous peut-être vous dire, les évènements sont indépendants, la probabilité de gagner un coin flip est toujours de 50% donc qu’on joue 3 ou 4 flips d’affilée, un gain sera suivi d’un gain 50% du temps”.

Sauf que vous auriez tort. Pour 3 flips, un gain sera suivi d’un gain 41.6% du temps. Pour 4 flips, un gain sera suivi d’un gain 40.5% du temps.

 

Résultats

Nombre de GG

Nombre de GP

% du temps qu’un G suit un G

GGG

2

0

100

GGP

1

1

50

GPG

0

1

0

GPP

0

1

0

PGG

1

0

100

PGP

0

1

0

PPG

0

0

N’existe pas.

PPP

0

0

N’existe pas.

Dans les deux derniers cas, soit le gain arrive en dernier, soit jamais, il n’y a donc pas de possibilités qu’un gain soit suivi d’un gain.

Total du nombre de GG : 4
Total du nombre de GP : 4
Moyenne des pourcentages : 41.6% 

Je ne vais pas faire le tableau pour les 16 cas de 4 flips, mais croyez-moi, la moyenne des pourcentages donne 40.5%
Peu importe le nombre fini de flips (supérieur à deux) la moyenne des pourcentages sera inférieure à 50%.

Est-ce que cela revient à dire que quand on gagne un flip on a plus de chances de perdre le suivant ? Non bien évidemment, d’ailleurs le nombre de GG est identique au nombre de GP : il est de 4 pour 3 flips et de 12 pour 4 flips.
En se concentrant uniquement sur les cas où l'on vient de gagner un coin flip, on biaise l'échantillon et la probabilité change. Surtout, faire la moyenne de pourcentage est souvent une absurdité mathématique.

Imaginons que vous fassiez une longue session avec 99 coins flips dont 49 gagnés soit environ 49,5% . Puis une seconde session, très courte, avec un seul flip que vous avez gagné soit 100%. Est-ce pertinent de dire que sur vos deux sessions, votre taux moyen de coin flips remportés est de presque 75% (chatard !) ?
Non, je me répète : faire la moyenne de pourcentage est souvent une absurdité mathématique.

Bon c’est bien joli, mais pourquoi je vous raconte ça, vous demandez-vous peut-être ? Il se trouve que c’est précisément cette erreur qu’ont commise les chercheurs qui pensaient avoir démontré que la main chaude était une illusion.


L’étude sur la main chaude

En 1985, trois pontes de la psychologie sociale, Gilovich, Tversky et Vallone mettent à jour l’illusion de la main chaude au basket. Les spectateurs, joueurs et entraîneurs croient dur comme fer à la main chaude : qu’un joueur a plus de chance de marquer s’il vient de marquer que s’il vient de rater son panier. En montrant que la main chaude n’est qu’une illusion au basket, contrairement à ce que pensent tous les experts, les chercheurs en ont conclu qu’on devait trouver ce biais dans d’autres domaines et leur étude a été maintes fois étudiée et citée en exemple durant des décennies. Ce n’est que 30 ans plus tard qu’une énorme faille a été trouvée dans leur méthode, par deux autres chercheurs Miller et Sanjurjo.

Dans l’étude originale, les chercheurs avaient comparé le taux de réussite moyen de basketteurs après trois paniers réussis au taux de réussite moyen de ces mêmes basketteurs après trois paniers ratés. Ils ont constaté que ces taux étaient très proches et ont conclu que la main chaude n’est qu’une illusion.

La nouvelle étude a montré que si la main chaude n’existe pas, c’est-à-dire, si les tirs sont totalement indépendants, le pourcentage de tirs réussis après trois tirs réussis devrait être moins élevé que le pourcentage de tirs réussis après trois tirs ratés. Or dans l’étude de 1985 ces pourcentages étaient identiques. Conclusion : au lieu de démontrer l’inexistence de la main chaude, l’étude originale montrait son existence !


La main chaude, une illusion ou pas ?

Pour ce qui est du basket, tout porte à croire que la main chaude existe. Non contents d’avoir ré-analysé l’étude originale, Miller et Sanjurjo en ont refait une très vaste et avec plus de rigueur mathématique, qui confirme l’existence de la main chaude. Les pros du baskets avaient donc raison contre les chercheurs.

Cela étant dit, l’illusion est, si je puis dire, bien réelle.

Le cerveau humain est fait pour reconnaître des patterns est croit en voir là où il n’y a que de l’aléatoire. Face au hasard il y a deux cas de figure qui présentent chacun un biais : soit l’observateur croit faire face (à raison) au hasard et il sera tenté par l’erreur de Monte Carlo, soit il pense que l’acteur a un contrôle sur la situation et aura tendance à être victime de la main chaude, qui dans bien des cas n’est rien qu’une illusion.

L’étude de Gilovich et al. avait trois conclusions.
1. La main chaude est une illusion au basket.
2. Les experts surestiment l’importance de la main chaude.
3. Il y a une tendance à croire en la main chaude face à des événements totalement aléatoires.

Seul le premier point a été réfuté, les deux autres eux semblent bien valides, surtout le troisième qui est notamment responsable d’une énorme source de bénéfices pour les casinos...

 

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