@babidule Ca dépend ce que tu entends par jouer à l’ancienne. A l’ancienne les joueurs pouvait utiliser des stratégies qu’ils ne comprenaient pas et faire des winrates de malade. Ceci étant, aujourd’hui encore mais ce genre d’approche comme je vais le développer, me semble contre productif pour la progression globale. Perso je préfère dire qu’on joue avec les fondamentaux du poker.
En ce moment, il y a un phénomène intéressant qui se produit aux tables de manière exacerbée. Des joueurs produisent un jeu sans créativité, solide, avec 45 % de Cbet, X/F à 75 %, 5 % de 3bet et des fold 3bet à 65 % et par ici le winrate. Les winrates qu’ils peuvent produire sont parfois hallucinants. Pourtant, ces derniers semblent condamner à jouer à la même limite. Dès la limite du dessus, ça perd direct 10bb/100 minimum. On le voit entre la NL 5 et NL 10 sur PS, la NL 10 et la NL 20 sur Wina, etc. Tandis que les joueurs avec un style plus construits vont bien entendu sentir le gap mais ça ne va pas bloquer. Je me suis demandé pourquoi ? (oui parfois je me pose des questions)
En effet, d’un point de vue technique, pour un coach, c’est assez facile de faire progresser un style comme celui-ci. La base de la pyramide est solide, il suffit de construire dessus. En fait le problème est mental. En jouant ainsi, les joueurs ne se sont pas donnés la possibilité de progresser mentalement. Pire, ils se sont accoutumés avec une certaine idée de la variance. Et là pour le coach que je suis, c’est très difficile de les faire progresser car pour faire évoluer un jeu, il faut accepter souvent de perdre pour un temps et surtout un meilleur jeu déclenche plus de variance. Sauf que dès que ça va se passer mal un peu trop longtemps, le joueur va revenir à son ancien style de jeu. C’est vrai quoi, pourquoi se galérer pendant 50 Kh à faire breakeven alors qu’on faisait du 15bb/100 tranquille avant ?
Les styles du genre 16/12, je pense que si on est un coach expérimenté, c’est vraiment une faute professionnel de l’enseigner. Je ne parle pas pour un pur débutant mais quelqu’un qui a déjà une petite expérience poker. On va favoriser la maladie de la courbe verte : le joueur veut voir du vert partout, la courbe qui monte, on vérifie la courbe pendant la session, on veut terminer positif, etc. Bien entendu, 16/12, on est fainéant intellectuellement sur les tables, on a la recette, on applique, on verra plus tard quand on aura monté la roll pour la progression (beaucoup, beaucoup, beaucoup plus tard…) Ca bloque vraiment des progressions.
On a un phénomène analogue aux échecs même si pour le coup c’est de manière inversée. Des joueurs parviennent à vite monter leur elo avec un style super agressif mais d’un coup ça bloque et…ça bloque longtemps car ils vont devoir désapprendre ce qu’ils ont appris, accepter de perdre pour mieux rebondir par la suite, bref quitter leur confort de jeu et leurs petites victoires, ce que peu sont prêts à faire.
Un nouveau phénomène s’est également développé à des limites plus hautes, ou plutôt accentué, notamment sur la 50 et la 100. J’ai des joueurs 21/17, 4 % de X/R, 65 % de F3bet, 5 % de 3bet, des fold cbet hallucinants, etc. Ce ne sont pas des nits car ils savent de temps en temps sortir le bluffcatch ou le bon bluff. Ils me ramènent des winrates de mutants sur ces limites. J’ai essayé de comprendre et en fait une partie de la réponse est tellement simple que j’ai peine à la croire mais je l’ai réalisé avec les coachings. En effet, parfois j’ai des joueurs de 50/100 voire 200 qui me demandent du coaching pour les solvers. Souvent des joueurs qui on commencé le poker il n’y a pas plus de 2 ans. On regarde une main, par exemple pot 3bet river, le joueur part dans son analyse sur sa stratégie, une analyse très fine d’un point de vue solver. Il a sa range Monkey solver, les combos de bluffs river, de value, les petites subtilités qui vont bien, moi-même je rame, bref l’analyse parfaite. Sauf que moi je lui dis « euh, ton adversaire il fold 70 % au 3bet BTN et il a 60 % de fold flop, n’importe quel bluff river est un suicide pokéristique ». Et là ça bug, parce que ces valeurs ne leurs disent quasiment rien… En fait il y a tout un pool de regs abreuvé de solvers qui ne savent même plus lire un tracker, à partir du moment où le joueur en face à un bon VPIP/PFR il est catégorisé reg et on s’imagine jouer contre un solver. Ils ne vont pas augmenter les fréquences de 3bet ou de cbet parce que vilain fold trop. Vilain n’attend qu’avec des monstres à la river ou ne mise qu’avec des monstres, ils ne le voient pas. Et vilain ramasse tout simplement. Sans compter que même en matière de solver, finalement ils ne prennent que ce qui les arrange, combien de fois j’ai fait remarqué que pour un solver l’overbet turn après un check/check flop est standard et que le joueur semblait l’apprendre ?
En ce qui concerne mon approche dans les vidéos, j’essaye de trouver un juste compromis entre donner des conseils techniques adaptés à la limite, éviter de donner des conseils impossible à reproduire pour un joueur en raison de son niveau mais en même temps vous ne me verrez jamais jouer 15/12, j’estime que c’est mon rôle de sortir le joueur de sa zone de confort même s’il doit faire des erreurs pour cela. On n’oublie pas que la victoire aime l’effort.