Thread sur la Syrie

[quote=“Degun, post:636316”]Mais qu est ce que tu déplaces la ? Arrête de faire nimp plz[/quote]Il me semble que ce sujet a bien plus sa place dans la section “Actualités”, non ?
Mais sinon, je peux le remetrre dans “Tout le reste”… entre le Rigolorium et le thread des meufs à poil. :whistle:

Arrête de croire que je fais n’imp’, plz !

Tio et Degun la récré est finie…
Mouhahaha :stuck_out_tongue:

[quote=“Bluzified, post:636522”]Tio et Degun la récré est finie…
Mouhahaha :P[/quote] :laugh: :laugh: :laugh:

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Intervention en Syrie: Assad menace la France

[quote]MONDE - Les intérêts de la France seraient dans le viseur…

Le président syrien Bachar al-Assad a mis en garde lundi contre le risque d’une «guerre régionale» en cas d’action militaire occidentale, alors que Washington et Paris tentent de convaincre leurs opinions de la nécessité de frapper le régime syrien accusé d’avoir utilisé des armes chimiques.

«Le Moyen-Orient est un baril de poudre et le feu s’en approche aujourd’hui (…) Tout le monde perdra le contrôle de la situation lorsque le baril de poudre explosera. Le chaos et l’extrémisme se répandront. Le risque d’une guerre régionale existe», a déclaré le président syrien au journal Le Figaro.

Alors que Paris est en première ligne au côté de Washington pour mener une riposte, le président Assad a mis en garde contre une «politique hostile au peuple syrien». «Le peuple français n’est pas notre ennemi, mais (…) dans la mesure où la politique de l’Etat français est hostile au peuple syrien, cet Etat sera son ennemi». «Il y a aura des répercussions, négatives bien entendu, sur les intérêts de la France», a-t-il menacé.

Un parallèle avec Mohamed Merah

Il réfute par ailleurs que son régime soit responsable de l’attaque chimique du 21 août. «Quel intérêt à attaquer à l’arme chimique, alors que notre situation sur le terrain est aujourd’hui bien meilleure qu’elle ne l’était l’année dernière?», demande-t-il. Loin de calmer le jeu, Bachar al-Assad réaffirme sa détermination à continuer sa violente répression: pour lui, les insurgés syriens sont «des terroristes. 80 à 90 % de ceux que nous combattons appartiennent à Al-Qaida. Ceux-là ne s’intéressent ni aux réformes ni à la politique. Le seul moyen de leur faire face est de les liquider.»

Enfin, aux parlementaires français amené à débattre sur l’éventuelle intervention en Syrie, il lance: «Je leur demande: pouvez-vous soutenir l’extrémisme et le terrorisme? Peuvent-ils se mettre du côté de ceux qui, comme Mohamed Merah, ont tué des innocents en France? Comment la France peut-elle combattre le terrorisme au Mali et le renforcer en Syrie?»

Le président François Hollande s’est déclaré la semaine dernière «déterminé» à frapper le régime de Damas, accusé d’avoir utilisé des armes chimiques le 21 août, une attaque qui a fait «au moins 281 morts» selon Paris.

Aux Etats-Unis, Barack Obama, qui s’est dit prêt samedi à frapper le régime syrien mais a demandé un vote du Congrès, multiplie les appels téléphoniques à destination de membres de la Chambre des représentants et du Sénat pour tenter de convaincre les élus, qui doivent se prononcer dans la semaine du 9 septembre.[/quote]

Ben oui envoyons nos soldats français se fair exterminés en syrie,c’est pas comme si deriere la la Syrie il y avait La Chine et la Russie,c’est clair on rivalise a mort,et apres on vera ces ptites catins de Valls et Hollande faire semblant de pleurnicher les soldats morts.

Serieu c’est a gerber,peu importe la situation dramatique qu’il y a labas,on a rien a y faire,nos soldats n’ont pas a se faire explosé juste pour le bon vouloir de Hollande le Flan.
Parce qu’il faut pas croire,on a perdue d’avance en allant labas,tout ce qu’on va gagner c’est les tres possibles représaille.

Et cette histoire d’armes chimiques c’est plutot marrant pour justifier l’intervention,10 morts via des armes chimiques c’est pire que 10 morts tué a L’AK47 ?

Tout ce que j’ai a dire a ces trou du cul de socialistes occupés vous des problemes de votre pays il y en a tellement au lieu d’envoyé au charbon des soldats a une mort certaine.

Ce que je kiff le plus c’est l’agencement des evenements a savoir : mariage pour tous===> guerre en syrie, serieu what the fuck ???

T’es un petit peu chaud bouillant sur le sujet, et je crois d’ailleurs que la surchauffe arrive.

Heureusement que parfois, on s’occupe de ce qu’il y a autour de nous et qu’on ne reste pas uniquement centré sur nos préoccupation franco français.
Je crois qu’en tout point du globe nous sommes à peu près les même( français, brésiliens, canadiens, ivoiriens, syriens, russes…) et qu’on mérite tous de vivre avec un minimun de liberté et de paix.

Après si tu préfères regarder uniquement ton nombril et le problème du rake sur le .fr c’est ton problème, mais ce qui est vécu par le peuple syrien est une horreur autrement plus ignoble que ce que nous vivons en France mettre les problèmes de la France au même niveau que les massacres syriens est une grosse blague.

Enfin, nous sommes plutot bien placé en France pour savoir que ça peut aider d’avoir un soutien militaire afin qu’un groupe de résistant prenne le pouvoir dans leur pays.

Une fois dit ça, le gros problème c’est l’après. Car à chaque qu’il y a eu intervention, l’après n’a jamais été une réussite majeure c’est le moins que l’on puisse dire. :frowning:

OMG la on voit le niveau de reflection intellectuel SO SICK :blink: => a gerber :blink:

+1

OMG la on voit le niveau de reflection intellectuel SO SICK :blink: => a gerber :blink:

+1[/quote]

Je dois te répondre? je sais pas je vois aucune argumentation,dis moi.

Et pour repondre a laloose,on est qui nous français pour s’occuper des affaires d’autres pays?t’as vue le resultats avec l’irak et a libye nan?

Est ce que toi tu connais réellement la situation en Syrie,ou tu crois ce que TF1 et hollande t’on dis?
Est-on sur qu’il y a un massacre du peuple par l’armée et le président?
Parce que chaque camp se renvoie la balle et dis que c’est la faute de l’autre,que c’est l’autre qui utilise des armes chimiques etc etc,pourquoi on doit croire le camp des rebelles?

Dois je te rapeler qu’ils y a quelques années Sarkozy a invité à l’elysée Barchar el Assad et Khadafi ?

Donc c’est facile de jouer les sentimentalistes,sur l’émotion,ya des morts ouins ouins faut tous les sauver,il y des morts partout liés a la guerre en Afrique,en Palestines,ils se font massacrer pourquoi on iraient pas les sauver eux?

C’est la vrai vie les mecs,c’est pas call of duty,les soldats francais vont pas gagner facilement,faut pas croire que ca va etre bouclé en quelques jours,ca ve etres tres sanglant,ils vont se faire exterminés,coupés la tete,des familles francaises vont pleurés,des enfants,des femmes et je parle même pas des représailles.

Enfin bref continuez a jouez les sentimentalistes,mais c’est pas comme ca qu’on regle des conflits.,c’est comme ca qu’on les envenimes

Oue je suis un putain d’égoiste,tu m’as cerner t’es trop baleze mec,tu m’as mis a nue devant tout PA :blush: ,engage toi dans l’armée l’ami t’es si altruiste.

Je m’excuse,de penser d’abord a mon pays et a sa sécurité,avant de vouloir m’engager dans un conflit bien plus complexe que tu ne veux le penser,et d’y envoyé la plupart des soldats a une mort certaine.

Là comme ça t’as l’air de connaitre la situation comme un chef. :wink:
Tu sors des généralités à 2 balles, tu veux me faire passer pour un crédule qui croit tout ce lui dit la TV et TF1 en particulier.
ça semble l’argument ultime des mecs cool, les journalistes tous des crétins juste là pour nous manipuler et à la botte de l’état.
Bien sur, tu es du genre à préférer croire Soral ou Dieudo, je parie.
C’est un choix mais surtout n’essaye pas de faire l’expert ici. Tu régurgites uniquement le discours d’un mec qui te semble plus crédible mais qui lui aussi peut être te manipule :slight_smile:

En plus autant on pouvait suspecter TF1 d’être les toutous de Sarkozy (vu les amitiés communes) autant dire que TF1 nous manipule pour faire croire au discours de Hollande, je me marre. :laugh:

Comparer la souffrance des Palestiniens à celle des syriens, c’est tout à fait comparable et puis ça fait avancer le schmilblick.
D’ailleurs le jour ou Israël utilisera l’arme chimique sur la Palestine on en reparlera.
Putain à force d’être sur ce forum, je vais devenir pro israélien car vraiment ras le cul d’entendre les conneries débitées par les pseudos pro palestiniens.

Au fait tu crois vraiment que c’est par altruisme qu’on s’engage dans l’armée. j’ai plutôt l’impression que c’est par masochisme.

Bon sinon, je vais m’autoban de ce thread car je sens que ça va dégénérer (que je vais dégénérer) :laugh: :laugh:

[quote=“laloose, post:638101”]Après si tu préfères regarder uniquement ton nombril et le problème du rake sur le .fr c’est ton problème, mais ce qui est vécu par le peuple syrien est une horreur autrement plus ignoble que ce que nous vivons en France mettre les problèmes de la France au même niveau que les massacres syriens est une grosse blague.[/quote]Je veux juste réagir là-dessus, sans agressivité. On est tous choqués par les massacres, et ils nous sont insupportables. Ce qui me dérange, c’est à quel point ils ont été exploités sans être résolus. Le cas le plus récent est la Lybie. La situation était insupportable. BHL et Sarkozy interviennent, et en font une récupération médiatique assez dégueu IMHO. MAIS SURTOUT, une fois leur coup de pub passé, ils se barrent, et la situation est pire qu’avant (génocide des noirs, guerre entre courants religieux, etc).

Quand bien même les massacres nous boulversent, le “devoir de sauver” m’inquiètent. (a) il sous-entend une supériorité de la civilisation occidentale sur les autres, (cf. C.Guéant), (b) IMO, il provoque un aveuglement. Sous prétexte de justice, on ne regarde pas nos méfaits. Par ailleurs, aussi touché soit-on, on n’est pas responsables de toutes les horreurs du monde. On peut choisir de s’engager, mais ce n’est pas un devoir. Le volontarisme obligatoire sous prétexte de moral m’inquiète grandement

Lol colle moi encore plus d’étiquette allez j’aime ça,pourquoi je parle d’afrique et de palestine,tu retiens que palestine?

Pourquoi t’attaque ma personne,et tu parles pas du sujet?
Pourquoi tu me parle de Dieudo et Soral,je croyais que c’était un sujet sur la Syrie?
Je vois que t’as répondues a aucune de mes questions précédentes,je m’attends pas a que tu reponds a celles ci.

Les question que je t’ai posé sur le conflit,je n’en ai pas la réponse et toi non plus le soucis c’est ca,on connait pas la réel situation mais tu veux envoyer des soldats au charbon.

Et je comprends pas en quoi tuer des gens a l’arme chimique c’est plus scandaleux que les tuer tout courts?

Enfin bref j’arette aussi ce thread,si c’est pour me faire coller des etiquettes débiles au lieu de parler du fond du sujet c’est super interessant !!

[quote=“chabab93, post:638129”]
Enfin bref j’arette aussi ce thread,si c’est pour me faire coller des etiquettes débiles au lieu de parler du fond du sujet c’est super interessant !![/quote]

Je devais m’autoban de ce thread mais c’est plus fort que moi lorsqu’il y’a conflit faut que j’intervienne. :wink:

Juste pour dire que la 1ère étiquette à la con c’est toi qui me l’a collé “en m’insultant (dans ta bouche ce doit être une insulte) de resortir ce que débite les journaux de TF1.”
Après ce que je sors n’est pas une étiquette vu que j’ai suivi un peu le thread Dieudo et tu es un adepte. C’est juste un fait faut pas un avoir honte. :slight_smile:

[quote=“doudou2000, post:638127”][quote=“laloose, post:638101”]Après si tu préfères regarder uniquement ton nombril et le problème du rake sur le .fr c’est ton problème, mais ce qui est vécu par le peuple syrien est une horreur autrement plus ignoble que ce que nous vivons en France mettre les problèmes de la France au même niveau que les massacres syriens est une grosse blague.[/quote]Je veux juste réagir là-dessus, sans agressivité. On est tous choqués par les massacres, et ils nous sont insupportables. Ce qui me dérange, c’est à quel point ils ont été exploités sans être résolus. Le cas le plus récent est la Lybie. La situation était insupportable. BHL et Sarkozy interviennent, et en font une récupération médiatique assez dégueu IMHO. MAIS SURTOUT, une fois leur coup de pub passé, ils se barrent, et la situation est pire qu’avant (génocide des noirs, guerre entre courants religieux, etc).

Quand bien même les massacres nous boulversent, le “devoir de sauver” m’inquiètent. (a) il sous-entend une supériorité de la civilisation occidentale sur les autres, (cf. C.Guéant), (b) IMO, il provoque un aveuglement. Sous prétexte de justice, on ne regarde pas nos méfaits. Par ailleurs, aussi touché soit-on, on n’est pas responsables de toutes les horreurs du monde. On peut choisir de s’engager, mais ce n’est pas un devoir. Le volontarisme obligatoire sous prétexte de moral m’inquiète grandement[/quote]

Mais je suis OK avec la plupart des trucs que tu dis pour ne pas dire avec tout (car j’aime bien chipoter).
D’ailleurs, mon point de vue est qu’il faudrait intervenir mais qu’il faut surtout penser à l’après.
Car c’est ça qui merde le plus à chaque fois on est bien d’accord. Et si pas de solution pour “après” bah pas d’intervention car c’est effectivement pas possible de continuer à faire comme en Libye.
Enfin bon pour le moment au Mali ça a plutôt l’air de se passer convenablement.

Après je réagissais plus au fait de dire faut pas intervenir car y’a dejà bien assez de problème en France.

Le point de vu d’un historien
http://www.les-crises.fr/syrie-ou-le-suicide-moral/

L’affaire syrienne, ou le suicide moral des socialistes français, par Chokri Ben Fradj

L’agression franco-américaine contre la Syrie se prépare ouvertement et en plein jour.

Qu’elle ait lieu finalement ou pas, elle nous permet, déjà, de constater que les socialistes français ont achevé leur mutation idéologique entamée, sous Mitterrand, en 1983.

Tournant le dos, dans la pratique, aux valeurs essentielles exposées par Jean Jaurès, au moment de la fondation de la SFIO en 1905, puis à la veille de la Grande Guerre, réaffirmées ensuite (du moins sur le papier) par Mitterrand et ses collaborateurs, lors de la refondation du parti au congrès d’Epinay de 1971, les socialistes français d’aujourd’hui n’ont pas hésité à jeter à la poubelle toute perspective transformatrice menant à l’édification d’une société socialiste démocratique (le terme de « socialisme » n’apparaissant même plus, à ma connaissance, dans leur discours politique), la troquant contre un sentimentalisme moralisateur et béat. Pire encore : les directions présidant actuellement (et ayant déjà présidé) aux destinées du PS (mais aussi à celles de l’État) ont, progressivement ramené (à travers leurs renoncements successifs) le concept même de gauche à une coquille vide. La chose est déjà flagrante avec leur alignement, ancien, mais de plus en plus amplifié, sur le néo-libéralisme, ayant réduit le débat politique (entre droite et « gauche ») à des joutes stériles et dénuées de tout véritable enjeu. Le reniement est toutefois encore plus « explosif » sur le terrain de la politique étrangère, le drame syrien étant là pour en démontrer l’ampleur.

Certes, faire la guerre ou menacer de la faire (surtout quand le prétexte parait si grossièrement fabriqué de toute pièce) a toujours été un bon moyen de détourner l’attention des citoyens de l’incapacité de leurs dirigeants à s’attaquer effacement à leurs vrais problèmes, mais nos chers dirigeants semblent, bel et bien, ici, avoir poussé le bouchon un peu trop loin. Sur le dossier syrien, nos socialistes se sont, en effet, rendus coupables ni plus ni moins d’une sorte désertion idéologique et politique en rase campagne. Poignardant dans le dos des forces progressistes arabes dont ils sont pourtant censés être les alliés naturels1, ils se sont engagés sur une voie tellement indéfendable et absurde qu’il leur fallait toute la connivence coupable des médias français (qui ont épousé aveuglément leur approche, renonçant ainsi à leur rôle essentiel de contre-pouvoir) pour échapper à une très énergique et plus que justifiée dénonciation de la part des citoyens.

Voyons cela de plus près. Faisons, tout d’abord, deux remarques introductives.

La première est que les relations franco-syriennes sont relativement anciennes et pas du tout neutres : la France fût, en effet, l’ancienne puissance coloniale ayant exercé « son mandat » sur la Syrie (et sur le Liban) entre les deux guerres. L’armée française s’adonna, à cette époque, à une répression féroce et sanglante contre les résistants syriens (notamment lors de la prise de Damas, par le général Gouraud, en 1920 puis au moment de la révolte des Druzes en 1925- 27, sous la conduite de Soltane al Atrache)2 dont les descendants entretiennent toujours la tragique mémoire. L’attitude de la France officielle d’aujourd’hui risque, donc, fortement, par son agressivité et son incroyable partialité, de réveiller de vieux démons à peine assoupis.

Du fait de cette histoire sanglante, la période du mandat français sur la Syrie fonda, en tout cas, les relations entre les deux pays de manière assez passionnelle qui eût son rôle dans la formulation du discours nationaliste syrien moderne dont l’une des composantes principales est le courant baasiste… Théorisé, dans les années 40, par deux intellectuels syriens, formés à la Sorbonne (le chrétien orthodoxe Michel Aflak et le musulman sunnite Salah eddine al Baytar) ce courant se revendique, officiellement, du nationalisme arabe (qu’il entend faire prévaloir sur les nationalismes locaux ou régionaux), du socialisme (dans une version, il faut le reconnaître, assez floue) et de la laïcité (perçue comme vecteur d’une démarche permettant le dépassement des appartenances ethniques et religieuses) ayant réussi à essaimer dans l’espace arabe, dans les années 50 à 70, le baathisme ne parvint, toutefois, à prendre le pouvoir qu’en Syrie (dès 1963) puis en Irak (en 1968 et jusqu’à l’invasion américaine de 2003). Dans ces deux pays, il se distingua par un autoritarisme extrême et une très grande intolérance à l’égard de ses adversaires ou concurrents politiques, y compris vis-à-vis des autres courants de la gauche arabe, avec lesquels les rapports oscilleront entre alliances momentanées et ruptures brutales suivies, parfois, de « purges » sanglantes3

La seconde remarque est que la Syrie, d’avant la crise actuelle, était loin d’être un pays arriéré.

Le régime, comme nous l’avons dit, y était certes dur, à l’image, il faut le rappeler avec insistance, de tous ceux de la région (dont certains, telle l’Arabie saoudite, bastion du salafisme wahhabite, la branche sans doute la plus sectaire, la plus rétrograde et la plus intolérante de l’Islam, le dépassent très largement dans ce domaine), mais il avait fait réaliser au pays de grandes avancées dans le domaine économique (autosuffisance alimentaire notamment), comme dans ceux de l’éducation et de la santé. Les femmes y ont acquis un statut avancé, avec un très large accès au savoir et à tous les domaines de l’emploi4.

Enfin, les diverses communautés religieuses (et tout particulièrement les minorités chrétiennes et musulmanes non orthodoxes) étaient assurées de leur liberté de conscience et de culte ainsi que d’une ferme protection de l’état (ce qui est rarissime dans une région plutôt travaillée, depuis longtemps, par le sectarisme et l’intolérance grâce, notamment, à l’argent de nos « amis Qataro-saoudiens »).

Il faut insister, par ailleurs, sur le caractère inexact attribué à ce conflit par beaucoup d’observateurs non avertis ou non initiés, prétendant, comme disait Charles De Gaulle, “aborder l’orient compliqué avec des idées simples” : En effet, Contrairement à la croyance répandue, le régime syrien, par sa nature, n’incarne pas l’accaparement du pouvoir (et des richesses ) par la seule minorité alaouite aux dépens de tous les autres. S’il résiste, jusqu’à présent et avec succès, aux assauts de ses ennemis, c’est, en effet, aussi parce qu’il a réussi une symbiose (certes imparfaite et parfois tendue mais réelle) non seulement, entre les diverses minorités religieuses (chrétiennes et musulmanes non orthodoxes) du pays mais aussi avec une partie considérable, libérale ou progressiste, de la majorité sunnite, l’idéologie officielle du parti Bass (le nationalisme arabe laïque) et la référence à la modernité servant, à des degrés divers, de ciment garantissant, pour le moment en tout cas, la pérennité de l’ensemble.

Tout ceci n’empêcha, pourtant, pas le déclenchement d’un considérable mouvement de contestation populaire, dès le mois de mars 2011 (dans le cadre de ce qu’on avait appelé « le printemps arabe ») nourri, évidemment, par des pratiques arbitraires et des dérives que l’autoritarisme et la répression avaient exacerbées.

Que fit le gouvernement français (soutenu, en cela, par la direction du PS) au moment où débutait ce qui allait devenir la crise syrienne ? Deux choix se présentaient devant lui : soit il soutenait les revendications démocratiques des opposants syriens, mais en se proposant, en même temps – et en cohérence avec la tradition diplomatique française dans la région – comme médiateur sincère et désintéressé entre le gouvernement et les contestataires afin de faciliter un dialogue national constructif et des évolutions positives, favorisant la voie du progrès et de la réforme. Contrairement à ce qu’avaient prétendu la plupart des médias français à l’époque, le pouvoir syrien et son président y étaient prêts5 et auraient sans doute été très sensibles à une médiation française allant dans le sens des véritables intérêts du peuple syrien. Dans un pays aussi complexe et pluriel que la Syrie, cette voie était, d’ailleurs, le seul chemin de la sagesse permettant un changement sans secousses, ni violences, ni affrontements, tous destructeurs pour le pays et sa cohésion. Ceci était l’évidence même et seuls des aveugles (surtout volontaires) n’auraient pas pu le comprendre.

L’autre choix possible pour Hollande était celui du pire et c’est, aussi stupéfiant que cela puisse paraître, celui qu’il va préférer. Sans doute très mal conseillé par Laurent Fabius (très visiblement habité, depuis le début, par une espèce de profonde et très irrationnelle détestation maladive pour le président syrien et son régime et dont le rôle, ici, fût, probablement très néfaste), il privilégia, en effet, la voie consistant à attiser le conflit en jetant délibérément et systématiquement, de l’huile sur le feu d’un brasier qu’il fera, depuis, tout pour entretenir comme si la Syrie et son peuple étaient, à ses yeux, un terrain d’expérimentation au profit d’un projet inavouable à savoir, et plus particulièrement, la tentative d’élimination du dernier régime arabe réellement hostile à Israël – qui continue à occuper, d’ailleurs, une partie de son territoire depuis bientôt 50 ans – et capable, par son potentiel économique et militaire, d’en menacer la suprématie régionale).

Ce faisant, il contribua (et là-dessus la responsabilité des dirigeants français sera écrasante devant l’Histoire) à engager la contestation syrienne (qui, d’ailleurs, ne concerna qu’une partie de la société et pas du tout son ensemble, même si cela n’enlève rien à sa légitimité) sur une voie qui n’était pas la sienne au début : celle de la violence sanguinaire dont le visage meurtrier (et cela aussi a été totalement occulté par les médias français) apparut très vite, les auteurs étant des islamistes radicaux s’acharnant sur des soldats et policiers ainsi que sur des fonctionnaires civils de l’État syrien, dont près de deux cent furent massacrés dans les toutes premières semaines de la contestation dans des conditions souvent atroces (égorgements et décapitations précédées d’abominables tortures).

Les forces du régime y ripostèrent durement et sans doute de manière excessive, faisant de nombreuses victimes parmi les civils, l’engrenage infernal habituel étant ainsi enclenché.

Le gouvernement de Damas le reconnut d’ailleurs volontiers dans les déclarations publiques de ses dirigeants, en en mesurant l’effet désastreux. Il tenta même d’y remédier autant que possible à travers le limogeage immédiat et la sanction des responsables directs de la répression sanglante contre les contestataires et l’adoption rapide d’une série de réformes politiques, sociales et économiques dont les détails sont consultables sur le site officiel du gouvernement syrien.

Les « enragés » de la guerre civile n’en eurent, toutefois, pas cure. Ils entreprirent, en effet, tout pour favoriser encore plus la tension et bloquer toute solution de compromis (qui ne les intéressait en rien). Ils firent, dans ce sens, appel à des dizaines de milliers de fous furieux venus quasiment de toute la planète qui déferlèrent, depuis, sur la malheureuse Syrie (avec la contribution active des monarchies du golfe, de la Turquie, mais aussi des puissances occidentales) afin d’y mener « le jihad contre les mécréants » semant, sur leur chemin, la mort, l’horreur et la destruction.

Ces évolutions dramatiques auraient dû, à un certain moment, ramener les dirigeants français à la raison en leur faisant prendre conscience de l’abîme vers lequel la Syrie était en train de glisser.

Or il n’en fut rien. Avec une incroyable obstination dans l’erreur et une affligeante légèreté, Hollande et Fabius, s’engagèrent, en effet, dans un processus de diabolisation systématique du président syrien (pourtant l’un des plus jeunes, des plus ouverts et de loin le plus cultivé de ceux de la région) avant de tenter tout simplement de le délégitimer complètement, Fabius osant même déclarer, en « pesant ses mots » (et ceci restera, sans doute, dans les annales, comme l’une de ses plus honteuses et des plus lamentables déclarations publiques) que « Bachar al Assad ne mérite pas d’être sur terre »6.

(17-08-2012) Laurent Fabius : Bachar ne mériterait pas d’être sur Terre

Ce qui sera, dans cette affaire, encore plus absurde et même dérisoire, ce seront les prolongements de ce choix : en combinaison étroite avec le Qatar, la Turquie et l’Arabie saoudite, Hollande sortit de son chapeau un invraisemblable ramassis de « bras cassés », la plupart complètement inconnus des Syriens (certains – à l’image de Ismail Hitto, nommé, un temps, chef d’un fantomatique gouvernement syrien en exil qui ne vit jamais le jour – n’étant, d’ailleurs, même pas citoyens syriens, mais américains, exerçant, peu de temps auparavant encore, leurs talents au sein de multinationales américaines) dont il reçut aussitôt le chef (provisoire, car il démissionnera assez vite, sans doute conscient du sale rôle qu’on lui faisait jouer) pour l’informer publiquement que la France le considérait, désormais, comme le seul représentant légitime du peuple syrien – comme le président français le confirma, ensuite, très officiellement, dans sa conférence de presse, tenue à l’Élysée, en novembre 2012 où il annonça également qu’il comptait confier l’ambassade syrienne à Paris à « un ambassadeur » de l’opposition après l’expulsion, espérait-il, de l’ambassadrice officielle nommée par Damas. Il n’y parvint, toutefois, pas pour des raisons légales et juridiques, la France restant, malgré tout, un état de droit…

Cette initiative s’accompagna d’une autre, que les médias français ont aussi soigneusement et volontairement occultée. En effet, dans leur soutien à l’opposition syrienne, nos brillantissimes dirigeants socialistes ont délibérément choisi de systématiquement privilégier ses composantes les plus rétrogrades et les plus réactionnaires (financées, armées et défendues politiquement par les monarchies féodales du golfe persique à savoir et pour l’essentiel, l’Arabie saoudite et le Qatar dont elles dépendent totalement) et notamment le courant représenté par la branche syrienne des frères musulmans (issue de la « maison mère égyptienne » créée en 1928 avant de se propager dans l’ensemble de la sphère musulmane)7 .

Ce faisant (et ceci est lourd de signification et de conséquences), les dirigeants français furent amenés à boycotter radicalement (non pas par ignorance, mais en toute connaissance de cause) les composantes progressistes, laïques et libérales, pourtant présentes en France depuis longtemps autant qu’ en Syrie – et plus précisément, la coordination syrienne pour le changement démocratique dont la principale figure est l’intellectuel syrien progressiste, basé à Paris, Haytham Al manaa) sans doute parce que ces dernières refusaient le rôle de marionnettes qu’on voulait leur assigner et aussi parce qu’elles rejetaient le recours à la violence en même temps que toutes les formes d’ingérence étrangère dans les affaires de leur pays.8 Il va de soi, bien entendu, que les médias appliquèrent « religieusement » cette consigne, allant, ainsi, dans le même sens que le pouvoir.

Même s’ils font semblant de ne pas s’en rendre compte, ces orientations furent, pour nos socialistes (et pas seulement pour les dirigeants politiques), absolument désastreux quant à leur incompatibilité flagrante avec les principes fondateurs de la République et ses idéaux, dont le PS continue, malgré tout, à se réclamer. Ils se situaient aussi, tout naturellement, aux antipodes de ce que devrait être le positionnement politique d’un parti se prétendant de gauche en pareilles circonstances. Ce choix constitua, par ailleurs, pour nos socialistes, une « occasion en or » pour « royalement se ridiculiser » qu’ils ne ratèrent, bien sûr pas. Ils tentèrent, en effet, de faire croire que l’on pouvait effacer d’un trait de plume un gouvernement étranger légitime (qu’ils détestent) solidement en place et toujours reconnu comme tel par l’écrasante majorité des États du monde et ce au profit d’une bande de guignols et de fantoches sans la moindre représentativité, sans aucun projet politique clair ou crédible et qui ne seraient rien sans l’appui et le soutien permanent de leurs protecteurs et tuteurs étrangers.

Les choses allèrent même beaucoup plus loin : depuis le début de la crise syrienne, nos « très éclairés » dirigeants et la quasi-totalité des médias français attribuent l’ensemble des crimes et des exactions, commis en Syrie, à la seule armée syrienne et aux milices populaires relevant du régime. Ils refusent ainsi, avec une mauvaise foi et un aveuglement à toute épreuve, de reconnaître et de dénoncer, comme il se doit, les innombrables atrocités et les actes criminels monstrueux (égorgements, décapitations, massacres de soldats et de civils selon un critère religieux et communautaire, destruction et pillage de biens et d’infrastructures publiques ainsi que de lieux de culte, viols collectifs, etc…) commis par leurs « poulains et protégés », ces « héroïques résistants » (comme ose les appelle ce cher Laurent Fabius) qui s’étaient vite avérés des bêtes féroces sans foi ni loi. Les exemples en sont, en réalité, légion et tout aussi abominables les uns que les autres, il suffit de citer le cas des villages alaouites (les Alaouites étant une branche du chiisme, lui-même issu d’une scission au sein de l’Islam originel, intervenue au tout début de l’histoire islamique, mais que les tenants de l’Islam des ténèbres, soutenus et armés par nos « amis » du golfe, assimilent à des apostats destinés à l’extermination totale et collective) de la région côtière de Lattaquié, investis, il y a quelques semaines, par des djihadistes fanatiques et dont la population fût intégralement massacrée, ou encore le cas de ces villageois kurdes du nord de la Syrie, massacrés, eux aussi, par centaines, au cours de l’été, sans parler du village chrétien de Maaloula, l’un des plus grands trésors culturels de l’humanité, actuellement occupé par les djihadistes qui s’attellent à sa destruction et à son pillage méthodique. Nos médias et encore moins nos politiciens, tout occupés à diaboliser Bachar Al Assad, « le bourreau qui massacre son peuple », n’en ont strictement pas dit un seul mot (les témoignages et les preuves accablantes de ces crimes, d’ailleurs souvent très fièrement revendiqués par leurs auteurs, sont pourtant très facilement accessibles sur internet)

Il est, à vrai dire, bien difficile, de trouver pareil exemple d’acharnement et pareille persévérance sur le terrain des errements et des dérives invraisemblables dans l’histoire de la politique étrangère et de la diplomatie françaises, depuis la fin du second conflit mondial. C’est, tout simplement, consternant et totalement insensé.

Nous connaissons, certes, les liens étroits unissant, depuis longtemps, les administrations américaines successives aux islamistes. Le fait que certains parmi ces derniers (tels Ben Laden et ses disciples) se retournèrent contre eux, ne doit, à ce sujet, pas faire illusion, l’alliance entre les deux partenaires obéissant à des convergences idéologiques, mais aussi des intérêts comme des objectifs. L’essence religieuse de l’islamisme rencontrant, en effet, celle du fondamentalisme protestant très influent aux États unis, les deux idéologies œuvrant, par ailleurs, à la défense de l’ordre social établi et du libéralisme économique en les justifiant par la nécessaire soumission des hommes à la volonté divine. Le soutien américain aux rebelles syriens était donc (toute considération morale ou légale mise à part) dans l’ordre normal des choses, mais que viennent faire les socialistes français dans une telle « galère » ? Comment, selon quel principe, quelle morale, quelle loi française, quelles règle et tradition internationales serait-il possible, pour eux, de justifier, le moins du monde, une telle alliance avec les ennemis déclarés de la liberté, de la démocratie, du progrès et des droits humains fondamentaux ? Comment la France, état démocratique et laïque (dirigé, en outre, par un gouvernement socialiste) peut-elle accepter de s’engager dans cette collusion absolument contre nature avec des féodalités totalitaires et archi-obscurantistes (assimilant la démocratie à une mécréance destinant ses adeptes locaux à la décapitation en place publique) et ce pour faire la guerre (et, si possible, anéantir) le dernier régime moderniste et laïque du monde arabe ?

Les intérêts économiques, les contrats faramineux avec les émirs, les calculs géopolitiques permettent-ils à ce point d’endormir les consciences et de faire perdre, à ceux qui nous gouvernent, toute notion de ce que sont réellement les intérêts vitaux de la France ? Comment enfin peuvent-ils gérer cette incohérence politico-idéologique absolue consistant à faire la guerre aux terroristes islamistes en Afrique, à les pourchasser et à les réprimer en France, tout en les armant et en les soutenant politiquement en Syrie (où le discours officiel les transforme, comme par enchantement, en « résistants » en lutte contre « un tyran sanguinaire » ?

Beaucoup rappelleront probablement que politique et morale n’ont rien à faire ensemble, ne soyons pas naïfs et admettons-le. Dans le cas présent, cependant, on a un mal fou à saisir où réside l’intérêt bien compris de notre pays dans ces choix invraisemblables, où est la ligne de conduite ? Où est la vision ? Où est la continuité, sans parler de l’introuvable minimum de décence ?

L’évocation de « gentils rebelles démocrates » à distinguer des « méchants terroristes » est une farce tragique que les Syriens paient, tous les jours, aux prix des larmes et du sang. Alors, pourquoi ? Peut-être, tout simplement, parce que le cynisme est en train de devenir, plus que jamais, la règle et la référence en politique intérieure comme extérieure de nos chères démocraties. Et que, dans ce sens, il importe, à leurs yeux, de soutenir, par tous les moyens (et indépendamment de ce qu’ils peuvent être réellement), ceux dont l’action sert nos objectifs et nos intérêts ou plutôt ce que nos oligarques définissent comme tels, quitte à les rejeter ensuite, ou ailleurs – et même à leur faire la guerre chaque fois que leur présence ou leurs actions se transforment en obstacles ou en dangers pour ces mêmes objectifs ou intérêts. De la volonté d’inscrire notre politique dans le sillon de choix conformes à nos valeurs républicaines et civilisationnelles, notre oligarchie dirigeante est ainsi, passée à une sorte de politique à la carte, adaptable et révisable à souhait selon les nécessités et les circonstances

Ce qui nous paraît indiscutable, en tout cas, c’est que ce divorce, on ne peut plus criant, entre intégrité intellectuelle et pratique politique effective, dans la démarche des socialistes français (mais la droite, on peut le parier, n’aurait guère fait mieux) annonce, bel et bien, leur disposition à s’insérer, désormais et sans fausse pudeur, dans une conception des relations entre les nations ayant de plus en plus à voir avec le gangstérisme international, où la force remplace le droit et n’hésite pas à régulièrement le bafouer au vu et au su de tous. François Mitterrand n’a-t-il pas, du reste, dès 1990, annoncé la couleur sans ambages en s’embarquant, à côté de Georges Bush père, dans une entreprise dévastatrice, outrepassant, et de très loin, le but que lui fixa, à l’époque, le conseil de sécurité (qui donna mandat pour libérer le Koweït et en aucune manière pour saccager et détruire l’Irak tout en massacrant sa population civile par centaines de milliers). Cela s’apparente à une défaite tout à fait majeure de la démocratie et, pour la gauche française([que les socialistes prétendent abusivement incarner), à une sorte de suicide moral dont elle aura infiniment de mal à se relever.

À présent, le danger, le risque, le péril deviennent plus pressants : Obama et Hollande se disent déterminés à frapper la Syrie sous le prétexte, totalement fallacieux et au mépris de toute légalité internationale, d’utilisation des armes chimiques par l’armée syrienne, non seulement aucune preuve crédible ou le moins du monde sérieuse n’accable, dans ce domaine, les dirigeants syriens, pas assez stupides pour recourir à de telles armes alors qu’une commission d’enquête onusienne était sur place, mais le pouvoir syrien n’en avait pas besoin étant en train de gagner progressivement la guerre sur le terrain. Et quoiqu’un dérapage local, et pas du tout autorisé par le pouvoir, ne soit pas tout à fait impossible, la chose paraît, toutefois, hautement improbable, l’état syrien étant extrêmement centralisé au point qu’une telle bavure devient quasiment inenvisageable.

Cette première hypothèse n’étant pas du tout démontrée, il reste à se poser la question classique et fort logique ayant aidé à « coincer » tant de coupables, à savoir : à qui, objectivement, profite le crime ? Question fondamentale – à laquelle pourtant nos dirigeants et les médias à leur service nos dirigeants semblent n’accorder aucune importance. Leur but n’étant, manifestement, pas la recherche honnête de la vérité et l’établissement rigoureux de la réalité des faits, ils apparaissent ainsi obsédés par la construction d’un prétexte servant de justificatif au lancement d’une incroyable campagne d’embrigadement contre le régime de Damas. Cela rappelle, par exemple, le coup d’éventail donné par le Dey d’Alger au consul de France en 1827 et qui ouvrit le chemin à la conquête coloniale française de l’Algérie9. C’est, en tout cas, pour toute personne dotée d’un minimum de clairvoyance, là que se trouve la raison cachée de ce qui nous occupe actuellement. Les adversaires du régime syrien, refusant d’accepter leur probable future défaite, cherchent, en effet, par une minable manipulation des opinions publiques, à justifier une intervention contre un pays souverain qui n’a pas eu « la décence » de se coucher devant la domination occidentale.

À vrai dire, si le citoyen que je suis ne peut qu’être accablé par de tels agissements de la part des dirigeants d’un vieux pays démocratique, berceau de la révolution de 1789 et des droits de l’Homme, l’historien, lui (que je suis également) ne saurait être, pour autant, étonné. Les socialistes français ne font ici, à vrai dire, que renouer avec leur vieille idéologie coloniale, profondément hostile (sous prétexte d’arriération socioculturelle, d’immaturité politique et d’incapacité supposée à se gérer efficacement qu’ils pensaient déceler chez eux) à l’indépendance des peuples asservis et à leur souveraineté.10.

N’ont-ils pas déjà, d’ailleurs, depuis de longues décennies, dans leur ligne de mire, les régimes nationalistes et modernistes arabes. ? Leur implication directe dans l’agression contre l’Égypte de Nasser, en 1956, puis leur engagement, à côté des Américains, dans la guerre de destruction de l’Irak en 1990-91 et leur attitude actuelle vis-à-vis du régime syrien n’en sont-ils pas des preuves plus qu’assourdissantes ? Jamais, en revanche, on ne peut trouver trace du moindre engagement de leur part contre les états réactionnaires du monde arabe ou musulman, pourtant totalement indéfendables – le « lèche-bottisme » et la complaisance systématique étant, depuis toujours, de mise à l’égard de l ’Arabie Saoudite et le Qatar, pour ne citer que ces deux-là à titre d’exemple. Édifiant, non ?

Du reste, un rappel me semble, ici, indispensable s’agissant de l’usage des armes chimiques. C’est tout de même un comble et d’une hypocrisie cynique sans borne que de voir les représentants de l’oligarchie occidentale prétendre faire la leçon à la Syrie sur ce sujet : ont-ils oublié les horribles crimes de leurs propres armées qui, des années vingt à nos jours, se sont illustrées par un usage massif et répété de toutes sortes d’armes chimiques. Ils comptent, sûrement sur l’ignorance ou l’amnésie des citoyens (du reste entretenues par des médias serviles ayant trahi l’essence même de leur métier) pour faire oublier l’utilisation du gaz toxique par les armées franco-espagnoles contre l’insurrection marocaine du Rif dans les années 20, par les Anglais contre les résistants kurdes irakiens dans les années 3011, par les Américains lors des guerres de Corée puis du Vietnam et les deux guerres d’Irak (où l’utilisation d’uranium appauvri fût additionnée à celle du phosphore blanc, tous les deux aux effets terriblement dévastateurs pour de très nombreuses générations successives) et enfin par les Israéliens qui, depuis des décennies, « expérimentent » régulièrement contre les Palestiniens et les Libanais les armes de type chimique et autres armes tout aussi criminelles ?12, Israël s’étant doté, par ailleurs d’un arsenal nucléaire (dont elle détient le monopole dans la région) comptant plusieurs centaines d’ogives capables d’anéantir l’ensemble de la région plusieurs dizaines de fois successives.)

Tout ce « beau monde, bien propre sur lui » entend, aujourd’hui, sanctionner l’état syrien pour une utilisation supposée des armes chimiques qui est tout sauf démontrée. Peut-on, ici s’interroger si un jour viendra où il serait possible de demander des comptes à cette même oligarchie occidentale et à ses alliés ou s’il serait envisageable, à un moment ou un autre, de les faire juger pour les abominables crimes et les horreurs commis, par leurs soldats, depuis presque un siècle, contre les populations civiles des colonies puis contre les peuples asiatiques et du Proche-Orient ? Qui réussira, un jour ou l’autre, à traîner Georges Bush (père et fils) ainsi que les généraux et chefs des gouvernements israéliens successifs, devant le tribunal pénal international pour y être jugés pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre ? Tout le monde sait qu’une telle démarche relève de l’utopie absolue et qu’elle n’aboutira jamais. Pour « ces champions de la liberté et de la démocratie », l’impunité totale sera toujours garantie en toutes circonstances, pour eux et pour leurs états respectifs. Pour le gouvernement syrien, par contre, c’est une tout autre histoire : il est déclaré coupable d’avance et d’office, et déjà condamné, sans enquête équitable, ni examen, ni vérification réelle des faits, et doit donc « être puni » comme un vulgaire délinquant.

Les maîtres autoproclamés du monde doivent, pourtant, faire attention : à force de tirer sur la corde, celle-ci risque bien de se rompre et, alors, tout, absolument tout, deviendra possible.

Il importe, donc, ici, nous semble-t-il, de lancer un grand cri d’alarme en rappelant ceci : l’objectif réel de l’oligarchie occidentale à l’égard du Proche-Orient (auquel se sont clairement ralliés les socialistes français) n’a rigoureusement rien à voir avec un quelconque souci de défendre les droits de l’Homme et d’établir la démocratie dans la région. Il a, en revanche, tout à voir avec la volonté de mettre la main sur l’ensemble des richesses de la région. Dans ce cadre, les récentes découvertes d’immenses champs de pétrole et de gaz en méditerranée orientale, y compris le long des côtes syriennes, n’ont fait qu’aiguiser l’appétit des multinationales. Pour les contrôler, elles sont, sûrement, prêtes à tout et les états, à leur service comme toujours, les suivront. Indiscutablement, sur cette voie. Or la réussite de cette entreprise exige, comme préalable, la neutralisation puis le démantèlement des états nationaux actuels et leur remplacement par de petits cantons faibles et impuissants, à base confessionnelle et ethnique, dont l’Occident fera aussitôt de simples jouets à sa dévotion. C’est le sort qui attend la Syrie si le régime tombe, comme ce fût déjà le cas pour à l’Irak, dévasté, détruit, démembré et meurtri sous l’effet des deux guerres américaines, foncièrement criminelles, menées contre lui.

En attendant la réalisation de ce projet, la guerre de Syrie s’est transformée, en réalité, aujourd’hui (et cela aussi nos médias font tout pour le dissimuler) en une véritable guerre dont l’enjeu, pour la Syrie et son environnement régional proche autant que lointain, est ni plus ni moins, la survie ou la disparition d’une certaine forme de civilisation, à vrai dire pas si lointaine de la notre…

D’un côté, nous avons, et que ce soit autour ou en dehors de l’État syrien, un rassemblement de patriotes attachés à la préservation d’un état moderne et indépendant, maître de ses choix et de ses décisions, garant de la sécurité et de l’égalité de tous ses citoyens, toutes confessions confondues, gouverné selon une démarche rationnelle et ouverte au progrès social ainsi qu’aux indispensables réformes démocratiques que le gouvernement syrien actuel avait, d’ailleurs, entamées depuis deux ans13, sous, bien évidemment, les insupportables sarcasmes habituels des journalistes occidentaux

En face se trouve une coalition, on ne peut plus hétéroclite, divisée et confuse, structurellement inféodée aux féodalités obscurantistes et totalitaires du golfe, d’essence réactionnaire et confessionnelle, puissamment traversée par des courants génocidaires à l’idéologie totalitaire et sanguinaire, l’ensemble œuvrant activement – avec l’aide et l’extrême bienveillance des puissances occidentales, mais aussi d’Israël et de la Turquie- à la destruction de l’État syrien pour le remplacer par un pouvoir moyenâgeux de type théocratique, sous domination occidentale directe, avec la stricte application de la charia (dans sa lecture la plus primaire et la plus mortifère) comme devise et comme seule perspective.

Par sa nature même (et ceci nos impayables journalistes et décideurs l’ignorent ou sont incapables de le voir), ce conflit est en train de relancer, chez l’ensemble des patriotes et progressistes du monde arabe, le souvenir des luttes de libération nationale, menées jadis contre les colonisateurs anglais et français, et de réveiller, chez eux, la volonté (sensiblement assoupie depuis assez longtemps) de se battre avec acharnement pour que les acquis de ces combats (pour lesquels des centaines de milliers de résistants arabes sont morts) ne soient pas saccagés et détruits par les nouvelles barbaries surgies du fin fond des ténèbres. C’est aujourd’hui l’un des grands atouts idéologiques du régime syrien et l’une de ses principales cartes maîtresses dont il ne faut certainement pas négliger la portée.

À tort ou à raison, et en majeure partie par la faute impardonnable et la bêtise monumentale des dirigeants français, l’occident est, actuellement, en train de revêtir de nouveau, aux yeux des peuples arabes, ses vieux et hideux habits de l’oppression coloniale, de l’injustice, du mensonge et du racisme et il sera, désormais, extrêmement difficile d’effacer cette image de leur conscience collective. La mondialisation a, certes, énormément de défauts (et je fais partie de ses adversaires idéologiques les plus convaincus), mais elle a eu, au moins, le mérite de rendre possible l’effacement – si je peux dire – des « frontières informationnelles », grâce auquel l’intoxication et la manipulation de l’opinion mondiale deviennent une tâche très ardue et finalement vaine. Les médias français ne font donc qu’énormément se ridiculiser, aux yeux du public arabe, avec leur flagrante et caricaturale partialité sur le drame syrien.

La nature autoritaire et les failles du régime syrien, les erreurs, les exactions et même les crimes qu’il a pu commettre ou qu’on l’accuse d’avoir commis, avant comme depuis le déclenchement de cette guerre, peuvent-ils, en quoi que ce soit, justifier l’appui constant, cynique et scandaleux que nos oligarchies au pouvoir ne cessent d’apporter aux fossoyeurs de la Syrie, de sa civilisation et de son peuple ? Assurément, radicalement et définitivement non. Aucun esprit rationnel, responsable et conscient des réalités de cette région ne peut répondre par l’affirmative. C’est pourtant ce que font et continuent à faire nos chers dirigeants socialistes et ceux ayant adopté leur posture politique.

Rien ne prouve, certes, encore (répétons-le) que l’agression contre la Syrie aura effectivement lieu. Toutefois si tel était le cas, les apprentis sorciers de cette agression auraient bien tort, à mon sens, de croire que le scénario sera semblable à celui de l’Irak en 2003, quand une armée épuisée, démoralisée et démunie ainsi qu’un régime à bout de souffle et sans soutiens interne ou international s’effondrèrent en quelques semaines. La situation, aujourd’hui, en Syrie est profondément différente, le pays disposant d’une armée puissante et aguerrie se battant chez elle pour défendre sa terre et disposant de très solides et de très coriaces alliés. Pour l’état syrien et ses soutiens régionaux, la guerre qui s’annonce est, d’ailleurs, perçue comme un affrontement existentiel.

Tous ceux qui prennent la peine (ou qui peuvent) suivre les médias arabes réellement indépendants (où se déroulent des débats d’un haut niveau n’ayant strictement rien à voir avec la désespérante indigence de ceux diffusés par nos propres médias) savent que Syriens, Hezbollah et Iraniens se battront jusqu’au bout et avec tous les moyens dont ils disposent, avec un risque évident de faire exploser toute la région. Pour eux, l’équation est, désormais, très simple : « être ou ne pas être, telle est la question ». Ils savent aussi que le régime syrien pourra compter sur une très large solidarité au sein des peuples arabes et que les régimes « fantoches »de type Ben Ali ou Moubarak ne sont plus là pour en réduire l’impact sur les intérêts occidentaux. Ils savent, enfin, que les Russes ne peuvent pas ne pas réagir avec force et détermination contre toute agression visant la Syrie.

Parler de « frappes limitées et ciblées » est une foutaise destinée aux incultes politiques. Une fois le feu déclenché, bien malin sera celui qui prétend savoir comment et quand il pourrait être éteint. L’attaque probable contre la Syrie pourrait donc s’avérer être une aventure non seulement fondamentalement immorale, mais aussi totalement irresponsable. Les conséquences et les prolongements pourraient être catastrophiques et incontrôlables, y compris pour Israël dont l’occident entend, depuis toujours, défendre la suprématie régionale à tout prix ce qui constitue, assurément, l’une des raisons majeures du déchaînement occidental contre le régime syrien.

Aujourd’hui une odeur nauséabonde, rappelant l’ambiance et l’hystérie médiatique de la veille des deux guerres d’agression contre l’Irak, infeste l’atmosphère. Nos très chers dirigeants donnent la très nette impression de l’avoir complètement oubliée. Ils sont, par conséquent, incapables d’en tirer la moindre leçon et c’est bien tragique.

Faut-il attendre que le pire passe du virtuel au réel pour tenter de mettre un terme à cette affreuse mascarade…. avant qu’il ne soit trop tard ?

Chokri Ben Fradj (historien) – 12 septembre 2013 pour les-crises.fr

Ancien universitaire et enseignant chercheur à l’université de Tunis

Principaux travaux :

  • Aux origines de l’immigration nord-africaine en France histoire sociale et culturelle d’une communauté ouvrière (1900 – 1939) Thèse de doctorat en histoire contemporaine. Université Paris 7 1990 4 volumes

  • Un combat laïque en milieu colonial Discours et œuvre de la ligue française de l’enseignement en Tunisie (1891- 1955) Édition l’Harmattan Paris 2004

  • Oliviers et oléiculture en Tunisie, de l’antiquité aux années 30 ; Édition l’Harmattan Paris 2011

  • Le parti communiste français et le Maghreb (1920 1934) en cours de rédaction

Ainsi que de nombreux articles publiés dans diverses revues autour notamment, du fait colonial, du fait musulman et de la question migratoire

En témoignent, par exemple, les interviews successifs du politologue franco-syrien Bassam Tahhan disponibles sur internet, les écrits du journaliste algérien Ahmed Halfaoui, diffusés également sur internet, les prises de position des représentants de la gauche radicale tunisienne dans la presse et les médias locaux ainsi que les résolutions du congrès des intellectuels et journalistes arabes progressistes tenu au Caire les 7 et 8 septembre 2013. [:leftwards_arrow_with_hook:]
voir, à ce sujet, l’excellente étude de l’historienne Lenka Bokova : la confrontation franco-syrienne à l’époque du mandat : 1925 1927/ : édition l’Harmattan ; Paris 2000 [:leftwards_arrow_with_hook:]
sur cette question, on peut utilement consulter, sur internet, l’article de Anne Lucie Chaigne : Parti Bass ; publié sur le site : les clés du Moyen-Orient ; également les ouvrages de : Olivier Carré : le nationalisme arabe ; édition Fayard Paris 1993 ; de Caroline Donati : l’exception syrienne entre modernisation et résistance ; édition la découverte ; Paris 2009 et de Charles saint Prost: le nationalisme alternative à l’intégrisme ; édition Ellypses ; Paris 1996 [:leftwards_arrow_with_hook:]
sur ces aspects, voir, notamment, sur internet, la rubrique : indicateurs internationaux de développement humain : République arabe syrienne ; également : système de santé syrien dans Wikipédia [:leftwards_arrow_with_hook:]
Il suffirait de revenir aux déclarations publiques et répétées des responsables politiques syriens au début de la crise qui allait ravager le pays pour le constater [:leftwards_arrow_with_hook:]
déclaration faite en Turquie, lors d’une visite officielle au mois d’août 2012 [:leftwards_arrow_with_hook:]
voir, à son sujet, l’ouvrage de Olivier Carré : les frères musulmans ; collection Archives ; édition du seuil 1983 [:leftwards_arrow_with_hook:]
voir, notamment, sur ce point, et quoiqu’avec certaines réserves, l’éditorial ainsi que l’article de Jacques Julliard dans le magazine Marianne en date du 7 au 13 septembre 2013 [:leftwards_arrow_with_hook:]
consulter, à ce propos, l’ouvrage de Charles André Julien : Histoire de l’Algérie contemporaine, Tome 1 1827- 1870 ; éditions Puf ; Paris 1977 [:leftwards_arrow_with_hook:]
Consulter, par exemple, sur ce thème, l’excellent ouvrage de l’historien algérien Ahmed Koulaksis : Le parti socialiste et l’Afrique du Nord, de Jaurès à Blum, Édition Armand Colin, Paris 1991 [:leftwards_arrow_with_hook:]
sur ces deux cas, consulter, par exemple, l’article de Cédric Mas /une brève histoire des gaz de combat, publié sur le blog de Paul Jorion en date du 4 septembre 2013 [:leftwards_arrow_with_hook:]
Les images diffusées, en direct, par les télévisions du monde entier ; lors des dernières guerres israéliennes contre le Liban et Gaza en 2006, 2009 et 2012 rejoignant celles, plus anciennes, datant des années 80 pour ne laisser aucun doute là-dessus, [:leftwards_arrow_with_hook:]
voir pages précédentes et le site officiel du gouvernement syrien [:leftwards_arrow_with_hook:]

Je préfère le copier coller directement au cas où il serait effacé comme par magie du site en question.

Autre info intéressante :

[video width=425 height=344 type=youtube]QztgjFSPwfA[/video]

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