Costa Croisière, le nouvel eldorado du poker?

mizar2001 wrote:

[quote]Jour 3 : le purgatoire (l’histoire qui suit peut sembler inventée, mais elle est authentique)

J’avais prévu de faire un break poker d’une semaine et de me détendre en famille, au soleil, sur un navire de croisière. Loin des cartes, des jetons, des bad beats… C’est réussi.[/quote]

Enorme, la première fois que je lis un post de cette taille, trop bon, merci Mizar :woohoo: :woohoo: :woohoo:

Canonbis

Le live c’est toujours aussi rigged.

Super récit. On rigole juste là où tu voulais.

Génial, vivement le récit de ta deuxieme soirée …

Un grand moment de bonheur!

Bravo, et vivement le prochain épisode!

excellent !!! merci mizard !

j’ai bien aprécier tes récits tres hilarants :wink: tu es super imaginatif

Ty pour le CR, vraiment sympa, j’ai bien rit :slight_smile:

Second chapitre aussi drôle et bien écrit que le premier

+1
MERCI

Excellent Mizar :cheer:

Tu as voulu l’éviter mais finalement tu l’as eu ta soirée bingo :laugh:

Bon, on est que en mars mais tu es définitivement nominé for
Ze post of Ze year

A quand le blog ?

PayMyFreedom wrote:

[quote]Excellent Mizar :cheer:[/quote]+1 c’est super cool c récit !

en tt cas sympa ton break B) :laugh: B) :laugh:

J’adore! :laugh:

Jour 3 (mercredi) : le millionnaire

C’est sur les coups de 23h15 que j’arrive au casino. Un peu plus tard que d’habitude donc, finition du compte-rendu de la veille oblige. Mes ambitions sont en berne depuis le premier jour de la semaine, où je me voyais déjà rembourser ma croisière, voir plus si affinité. Après deux soirées et grosso modo huit heures de jeu, j’ai quand même réussi l’exploit d’être dans le rouge en jouant sur la table de poker la plus facile du monde. Certes de peu (-70 euros), mais j’ai tout de même l’impression que c’est mon honneur qui est en jeu ici. Bref, je préfère désormais me fixer un objectif à la Guy Roux : finir la semaine dans le vert.
“Petit joueur !” vous dites-vous alors probablement devant votre écran, à cet instant. Et vous avez bien raison…

Première désillusion de la soirée. Il n’y a personne à table. Serais-je arrivé trop tard ? Je décide de m’asseoir pour attendre mes amis italiens et compulse le programme du lendemain sur le bateau, histoire de passer le temps :
10h Aquagym
11h Conférence sur l’après-rasage en Italien et en Anglais.
14h Tournoi de fléchette
16h Cours de flamenco
17h Conférence : Comment garder un ventre plat par Simona Flamini.
18h Tournoi de dames

Bon, je sens que demain, on va passer notre journée à visiter Abu Dhabi chérie !
Je tourne la page avec appréhension pour savoir quel sera le programme de la soirée quand je reçois une bourrade virile dans le dos. Lorsque vous ne vous y attendez pas, ça fait toujours drôle. Et pas forcément du bien. Trois de mes amis italiens viennent d’arriver et me saluent à leur manière. Je reconnais Penne, Bruschetta et Tortellini. Notre quatuor lance donc les hostilités. Et c’est toujours un vrai plaisir. En un quart d’heure, aucun d’entre eux n’a encore relancé preflop ou tenté le moindre bluff. J’affiche déjà 260 euros au compteur (+ 60 euros donc).

Malheureusement, la table va rapidement se remplir dans la demi-heure suivante. Penne nous rejoint, puis Flavio et Antonio, l’Espagnol que j’avais destacké le premier jour lors d’un heads up endiablé sur les coups de 3h du matin. Depuis ce duel, Antonio est persuadé que je passe mon temps à bluffer. Il n’a évidemment pas remarqué que je ne joue pas forcément de la même manière contre neuf joueurs. Il ne restera donc à table que dix minutes, pas une de plus, après avoir payé avec A2 mon trois barrels avec AQ sur un board Q5T44.

Pas facile de jouer en full ring sur le Costa Luminosa décidément. Les joueurs mettent beaucoup de temps à réfléchir ou à miser. Le rythme est lent, mais lent… Moi qui ai beaucoup de mal à joueur en cercle, notamment à cause de ça, je suis vraiment servi. Encore heureux que Tony ne soit pas de la partie ce soir. Le responsable du casino nous apprend d’ailleurs qu’il est resté assis seul à table sur les coups de 20h30, avant de partir au bout d’une demi-heure.
Ce soir, il y a deux têtes inconnues à table. Un Italien et un homme d’une quarantaine d’année en costard-cravate, qui ne dira pas un mot de la soirée. Dans le doute, je pars donc du principe qu’il est italien et le baptise Lino. Un hommage à Lino Ventura, excellent notamment dans le film “Le Silencieux”.

J’aime bien Lino Ventura. J’aime beaucoup moins Lino de Costa Croisière lorsque mon brelan max s’empale sur sa couleur touchée à la river. Bilan : une grosse moitié de mon tapis évaporée et un recavage dans les règles.
J’ai Bruschetta à ma gauche et Flavio à ma droite. Flavio est vraiment mon grand pote maintenant, même si nous ne dialoguons que sous forme de gestes ou d’onomatopées. J’ai d’ailleurs parfois l’impression de jouer un remake feutré de la “Guerre du feu” avec lui. Un terrible froid va pourtant s’installer entre nous lorsque je bénéficie de mon second gros set up favorable de la semaine. La première fois c’était contre Flavio en heads up, lundi dernier. La deuxième, c’est encore face à Flavio, et il trouve sans doute que ça commence à faire beaucoup.
Sur un board TTJTJ nos tapis s’envolent en toute logique, mon pote italien ayant AJ et moi KT.
Tous les convives de la table, excepté Lino, ne peuvent laisser échapper un “oooohhhh” presque langoureux. Flavio me fusille du regard. Il débite une centaine de mots en moins de 10 secondes. Déjà que 2-3 mots de suite, j’ai du mal à comprendre. Mais là… En même temps, c’est peut-être préférable.
Penne, lui, crie presque au scandale. Il hèle le responsable du casino, qui fait la grosse erreur de passer dans les parages à ce moment-là, et lui lance que la table est truquée. Que full max contre carré, ça n’arriverait jamais avec un vrai croupier et des vrais cartes !

Penne Alarabiatta sera conforté dans son intuition lorsque, dix minutes plus tard, Spaghetti remportera un pot avec KK. Puis, quatre coups après, avec AA. Désormais, chaque set up sera l’occasion pour Penne de pester contre la table, et d’accuser le casino de vouloir créer artificiellement des grosses rencontres avec des gros pots pour amasser plus de rake.
Flavio, lui, n’a toujours pas digéré notre dernière confrontation et me fait la gueule pendant une bonne demi heure, me jetant régulièrement un regard sombre. Comme si c’est moi qui avais truqué la table.

A ma gauche, Bruschetta est sans doute l’un des joueurs les plus étonnants qu’il m’ait été donné d’affronter. D’abord parce que Bruschetta camoufle ses cartes en plaçant ses mains devant elles. Mais pas sur les côtés. Résultat : j’aperçois quasi systématiquement tout son jeu, d’autant qu’à chaque tour (preflop, flop, turn et river), il jette de nouveau un coup d’oeil à ses cartes. Craint-il que celles-ci puissent se métamorphoser entre le flop et la river ?
A sa décharge, Bruschetta n’est pas le seul à vérifier quatre ou cinq fois ses cartes pendant le déroulement du coup. Tous les autres joueurs le font aussi ! J’assiste d’ailleurs à un étonnant ballet, parfaitement synchronisé à chaque fois. Les cartes sont distribuées et, tels des automates, toute la table regarde sa main quasiment dans le même tempo. Le flop tombe, rematage de cartes dans la foulée. La turn, bis repetita. Et à la river, tous ceux qui sont encore dans le coup (c’est à dire encore une grosse poignée) reluquent une dernière fois leur jeu. Ceci explique aussi, en bonne partie, la désespérante lenteur du jeu quand la table est pleine.

Grâce à Bruschetta toutefois, je ne vais pas trouver le temps long. Le fait de voir presque à chaque fois ses cartes me permet de vivre des moments d’une rare intensité. Deux coups de sa part me marqueront d’ailleurs sans doute à vie.
Comme lorsqu’avec 73o sur un board QA28 et trois trèfles, il décide de suivre à la turn une mise de 2/3 du pot, alors qu’il y a encore deux joueurs derrière lui. Il faut dire que Bruschetta possède alors le 3 de trèfles…
Ce n’est rien à côté du coup d’extra-terrestre qui va suivre. Sur un board QJT à 5 joueurs, Tortellini mise d’entrée 1/3 du pot. Un call et deux folds plus tard, c’est au tour de Bruschetta de jouer. L’une des plus grosses calling stations de l’histoire maritime décide alors de folder négligemment son 98 ! Le coup se termine et Tortellini montre fièrement son AK et sa quinte floppée. Bruschetta a t-il vu que, lui aussi, il avait floppé une quinte ? Ou, guidé par un sixième sens hors du commun, a-t-il pressenti qu’il était dores et déjà battu au flop ? Quoi qu’il en soit, après ce coup, je ne vois plus Bruschetta de la même manière. Stu Ungar ou Phil Ivey sont des nains à côté.

Encore une fois, j’insiste sur le fait que toutes les situations et les coups que je vous raconte sont rigoureusement authentiques. Je me rends compte que ça paraît tellement gros parfois. Et pourtant.

Les coups s’enchaînent un peu plus vite désormais car la table s’est vidée progressivement. Il est 3h du matin et Penne vient de perdre un gros coup contre moi avec ses bottom deux paires contre mes deux paires max. Il se trémousse sur sa chaise et cherche tout azimut le directeur du casino pour lui dire sa façon de penser. Je suis parvenu à monter mon stack à 650 euros. Je suis fatigué et, même si Flavio a encore 160 euros devant lui, Il ne reste plus que 45 euros à Penne et 30 euros à Bruschetta. J’annonce à mes camarades que je joue les trois derniers coups. Au bouton, je regarde mes cartes et découvre une belle paire de roi. Ma première main premium de la soirée ! Vais-je achever cette session en apothéose ?
Je relance à 16 euros et suit payé par Bruschetta et ses 15 BB, ainsi que par Flavio.
Sur un flop raibow 9J6, je CB à 40 euros. Fold de Bruschetta, qui préfère préserver ses 14 euros pour les deux coups restants. Et call de Flavio, qui se tortille sur sa chaise.
Turn : un 4. Je balance la sauce et Flavio me fusille de nouveau du regard. Il se lève, mitraille une salve de mots en “i”, puis appuie sur le bouton call dans la foulée.
Nos cartes se retournent, celles de mon adversaire affichent T8 pour un tirage quinte.
Le 7 à la river me crucifie, pendant que Flavio pousse un gigantesque hurlement, qui doit réveiller au moins la moitié des passagers du navire. Flavio rayonne. Il s’agite, se tourne vers moi et vient prendre mes mains pour les serrer chaleureusement, l’air de dire “on est quitte maintenant”.
Je viens de me faire suckouter un pot de 340 euros juste avant d’aller faire dodo. Par le meilleur moyen de trouver rapidement et paisiblement les bras de Morphée.

Je rentre dans ma cabine un peu sonné. Alors qu’à une carte près, j’aurais pu rembourser près de la moitié de ma croisière, je finis la soirée avec un bénef de 220 euros.
En soi c’est loin d’être négligeable. Et pourtant, je suis déçu. Dans mon lit, je ne peux m’empêcher de penser au “Millionnaire”, cette ancienne émission de télé présentée par Philippe Risoli et parodiée par les Inconnus. Les candidats devaient tourner une roue qui leur permettait de gagner entre 100 000 et 1 million de francs. Et lorsqu’il ne gagnaient “que” 100 00 ou 200 000 francs, on pouvait clairement lire du désarroi, voire de la détresse sur leur visage.
Cette nuit-là encore, je ferai un rêve bien étrange…

(à suivre)

Dernier jour (jeudi) : Incassable

Le premier bad beat de la journée a lieu quelques heures avant que je m’assois à la table de poker. Accablé par des problèmes de dos depuis plusieurs mois et alléché par une offre promotionnelle, je prends rendez-vous pour une séance de massage au centre de beauté, situé au 10e étage du Costa Luminosa. En fait, il y a également une troisième raison. En visitant le “beauty center” en début de semaine, j’avais remarqué que la masseuse avait de faux airs de Monica Belluci, la poitrine généreuse en moins.
Mais bon, 55 c’est moins bien que QQ (je vous laisse traduire), mais c’est toujours mieux que 93o !

Sur les coups de 18h, je me pointe donc à mon rendez-vous. Je me dis qu’une petite séance de massage avec Monica ne peux qu’avoir un effet relaxant positif avant mon ultime combat face à mes amis italiens. Mais lorsque les cartes apparaissent au détour du lounge d’accueil, je peux difficilement masquer ma déception. Ce n’est pas Monica mais une lointaine cousine de Christine Boutin qui me montre la table et me dit de me dessaper. J’ai envie de crier “misdeal”, mais parvient à me contrôler. L’heure qui suivra sera rugueuse. Espérons qu’au moins, la soirée ne le sera pas…

Il est 22h30 lorsque je me pointe au casino. Assis seul à table, j’entrevois une silhouette familière, un verre de champagne et un magnum à ses côtés. C’est Tony ! Nous nous saluons courtoisement et celui-ci me lance : “Tonight, I’m sober !”.
“For the moment”, lui rétorque-je avec le même accent anglais que Jean Lefebvre dans “Le Gendarme à New York”.
Nous entamons un heads up qui durera à peine deux minutes puisqu’un banc entier d’Italien se rue rapidement à notre table. La roulette c’est bien sympa, mais le poker, c’est autre chose ! La table se remplit cette fois en moins de dix minutes. C’est tout juste s’il n y a pas une liste d’attente. J’en profite pour prendre quelques photos souvenirs avec mon IPhone, car c’est la dernière fois que nous nous retrouvons tous. Demain, le navire accoste à Dubai et le casino n’ouvre qu’en mer. A quai, c’est interdit.

Penne n’est pas chanceux ce soir. Toutes les cinq minutes, il remet en doute la probité de la table électronique. La goutte d’eau de trop survient lorsqu’il part à tapis au turn avec un set face à Flavio, lequel n’a qu’un malheureux tirage quinte à lui opposer. Lequel tirage quinte rentrera évidemment à la river. Double hurlement primaire, de Penne et de Flavio. Un cri qui n’a sans doute pas la même signification pour les deux hommes. Lorsqu’il touche l’un de ses 8 outs miraculeux à la “riviera” - sa spécialité puisque j’en avais été la victime la veille - Flavio hurle, mais aussi agite les bras dans tous les sens. A tel point qu’on a presque l’impression qu’il fait un bras d’honneur à son adversaire…
Penne n’en a pas l’impression. Il en a la certitude ! Il s’en prend à Flavio, lui reproche son geste. Flavio se défend, jure qu’il est innocent. Mine de rien, on assiste là à la première engueulade de la semaine à table. Le ton monte et Spaghetti doit jouer les casques bleus pour calmer les deux hommes. Pendant ce temps, Tony entame son sept ou huitième verre et commence à montrer des signes de faiblesse.
Tortellini me demande ce que je fais dans la vie. Je lui réponds, avec un sourire malicieux, “joueur de poker”. Cela fait rire toute la table, je parviens même à dérider Penne, dont la couleur hauteur K n’est pas suffisante face à la couleur max de Spaghetti.

Mon bilan au bout d’une heure et demi de jeu n’est pas folichon. J’ai perdu une pot substantiel et je suis à -40 euros malgré un rush de cartes (99, AK, QQ, AA) sans précédent depuis le début de mon aventure à bord. Il faut dire que lorsque je touche mon set max avec QQ, mon continuation bet ne trouve aucun preneur pour la première fois de la semaine. Idem quelques instants plus tard avec ma paire d’As !

Il faut croire que l’histoire que je vous raconte depuis le début de la semaine finirait en eau de boudin. Un peu comme “Incassable”, avec Bruce Willis et Samuel L. Jackson. Vous savez le film qui s’arrête au moment où ça devient intéressant.
C’est aux alentours de minuit que notre histoire s’arrête brutalement. Ne vous inquiétez pas : ce n’est pas le bateau qui coule ou Tony qui sort un flingue et fait un carnage. C’est simplement notre table électronique qui rend l’âme. Pendant près de trois quart d’heure, trois employés du casino vont s’employer à la remettre en état de marche. En vain.
Penne demande au directeur si l’on peut continuer à jouer avec un vrai croupier. Il essuie un refus poli. Tony propose de jouer entre nous avec des vrais cartes et l’argent sur la table, comme dans les films. Seul Flavio semble chaud comme la braise. Perso, je ne sens pas trop le truc et je ne suis apparemment pas le seul. Nous nous levons (presque) tous et nous souhaitons una “buena notte”, les Italiens se dirigeant aussitôt vers les tables de roulette, moi vers ma cabine. Seul Tony reste assis, occupé à se servir un verre.

Au final, si mes calculs sont bons, j’aurai dégagé un bénef de 110 euros en quatre jours et claqué sans doute plus de 500 euros en rake. Sans regret. J’ai l’impression d’avoir vécu une expérience unique et j’ai finalement passé quelques moments très sympas avec mes amis italiens.
Je reste encore trois jours à Dubaï. Cette fois, c’est promis, je prends vraiment des vacances.

PS : Les photos suivent

Quelle croisière! C’est incroyable ^^

Le prodige “Bruschetta” ne doit pas de laisser indifférent quand même! Quel instinct!

Merci Mizar de nous avoir fait partager ton aventure non cappée, j’ai bien rit.

C’est dommage pour Dubaï car à mon avis, y a moyen de trouver du client, mais les vacances, c’est vacances :stuck_out_tongue:

Enjoy.

J’ai pris quelques photos avec mon Iphone… :slight_smile:

De gauche à droite : Bruschetta, Tony et Flavio. La tension est à son comble.

Tony me fait un doigt au moment où je le prends en photo (humour british). Vous remarquerez la coupe de champagne sur sa gauche, et le magnum juste derrière…

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