Dans un post précédent, Jérome pose une question tirée d’un extrait de Mathematics of Poker, concernant une main en Omaha/high.
Je trouve que cette question est l’exemple type du problème que j’ai avec Sklansky, et donc Chen : c’est une analye basée sur des informations que l’on ne peut avoir, donc une réflexion mathématique utilisant les règles du poker, et non une réflexion de poker.
La main de l’adversaire est choisie de façon à lui donner le meilleur tirage possible sur le board (la wrapped quinte avec les 4 cartes, et la certitude d’avoir le nuts s’il touche).
En pratique, il n’est pas possible de calculer l’expected value du call ou du raise de façon aussi précise, et si on ajoute aux mains possibles de l’adversaire un 3, une wrapped quinte avec 3 cartes, un tirage quinte simple, …), et que l’on rajoute que certaines de ces mains (les favorites par ex.) vont payer la relance, alors que d’autres vont jeter, le call peut devenir meilleur en moyenne : call sur le flop, et push si un blank arrive au turn.
N’ayant pas lu Mathematics of poker, c’est plus un reproche sur theory of poker, et son « théorème fondamental » : la notion d’erreur est définie par rapport à un résultat (la main que chaque joueur a effectivement), au lieu de l’être par rapport à la situation, i.e. les éléments maitrisés par le joueur (sa main, le board, la taille du pot, le style de l’adversaire => un ensemble de mains possibles)
Par exemple, en Hold’em NL, supposons que vous ayez KK, et qu’il y ait une relance avant vous, vous décidez de surrelancer. Seulement, pas de chance, votre adversaire à AA. Avez-vous fait une erreur ?
Sklansky dit oui : chaque fois que vous jouez unemain différemment de la façon dont vous l’auriez jouée si vous pouviez voir les cartes de votre adversaire, vous faites une erreur au sens de son « théorème ».
Je viens de lire Mathematics of Poker qui n’apporte rien de très pratique pour les affaires courantes du poker. Les amateurs d’application de la théorie des jeux au poker y trouveront leur compte, les matheux qui cherchent a determiner leur risque de ruine en fonction de la bankroll et du tarif joué vont se régaler… En revanche rien de très pratique ni d’utilisable dans ce livre.
Pour Sklansky je suppose que tu parle des dernières pages du livre. Je suis également d’accord avec toi pour dire que toute la théorie expliquée, sans doute intéressante, semble complétement hors sujet pour les joueurs de poker.
Donc pour ajouter un petit commentaires sur ce post: je recommande vivement « Theory of Poker » car le contenu général du livre est intéressant et formalise plutôt bien les calculs qui aident à la décision. Les nombreux exemples pratiques aident à fixer efficacement les concepts. En revanche « Mathematics of Poker » est a réservé aux puristes et n’interessera probablement pas le lecteur moyen (c’est vraiment un livre très spécial :blink: )
Cette réponse est un peu hors sujet mais comme je vois pas mal de reflexion sur ces livres dans le forum j’ai simplement profité de ton poste pour donner mon sentiments sur ces 2 ouvrages à la mode…
Je viens de lire Mathematics of Poker qui n’apporte rien de très pratique pour les affaires courantes du poker. Les amateurs d’application de la théorie des jeux au poker y trouveront leur compte, les matheux qui cherchent a determiner leur risque de ruine en fonction de la bankroll et du tarif joué vont se régaler… En revanche rien de très pratique ni d’utilisable dans ce livre.
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Oui, c’est aussi mon inquiétude : le problème de la théorie des jeux, c’est qu’elle suppose que l’adversaire joue de façon optimale, et on en déduit la meilleure stratégie. Or au poker, il est souvent plus rentable de sortir du théorique pour exploiter les erreurs.
Par exemple, la théorie des jeux suggère de bluffer / payer à la river en fonction de la côte du pot : si la mise (en limit) est à 10% du pot, il faut miser en bluff environ 10% du temps (et bien sur toujours lorsqu’on a une bonne main), de façon à ce que l’adversaire ne fasse pas de profit, qu’il paye tout le temps ou jamais. Cette théorie est optimale, dans le sens où quoi que fasse l’adversaire, on a maximisé 'espérance de gain entre les cas où on a la meilleure main, et les bluffs (s’il paye tout le temps, on est payé quand on a la mailleur main, s’il jette tout le temps, on gagne le pot en bluff de façon à équilibrer le gain, et ça s’équilibre aussi s’il paye un pourcentage du temps, et jette le reste)
Or en pratique, le fait de bluffer ou non va dépendre des tendances de l’adversaire à payer ou à jeter trop souvent. Donc en pratique, la théorie des jeux laisse de l’argent sur la table.
En clair, la théorie des jeux donne une stratégie « optimale » contre des adversaires nonc connus, mais la stratégie n’est plus optimale si on profile l’adversaire.
A mon sens on a une dichotomie dans l’aspect théorique : des auturs comme Chen ou Sklansky qui cherche à modéliser de façon approximative les situations (en ignorant des choses come l’image à la table, le comportement dans les mains précédentes), pour chercher une solution exacte au modèle : dans telle situation, il faut relancer, là se coucher, …
Alors que d’autres (Gary Carson, Caro, …) jouent plus sur l’identification des faiblesses adverses et leur exploitation.
Sklansky tente de traiter cet aspect dans winning low limit hold’em, mais là encore, il décrit des condition s de jeu extrème, rarement rencontrées en pratique (6/7 joueurs au flop, capped bet 3 mains sur 4, ou l’opposé total), ce qui le rend intéressant sur le plan concept (perdre un bet plutôt qu’un gros pot, …) mais pas très applicable en pratique.
Oui, ça reste un très bon livre. Le gros point fort de Sklansky,c’est d’arriver à expliquerclairement les concepts, et d’avoir trouvé des termes très imagés, qui contribuent à clarifier le concept. Par exemple, il me semble qu’il est le premier à avoir parlé de semi-bluff, là où la littérature utilisait plutôt « bet on the come », qui masque le côté bluff.
Mais il faut être conscient que les conditions de jeu qu’il décrit dans le livre ne se rencontrent jamais en réalité (en tout cas je n’ai jamais eu de table telles que celles qu’il décrit, le fait de jouer en 6max a peut-être un rapport). Donc très bon pour les concepts, mais on ne peut pas les appliquer sans les comprendre. Ce n’est pas un livre de recettes, comme pourrait l’être super system par exemple.
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Cette réponse est un peu hors sujet mais comme je vois pas mal de reflexion sur ces livres dans le forum j’ai simplement profité de ton poste pour donner mon sentiments sur ces 2 ouvrages à la mode…[/quote]
Non, je ne trouve pas que ce soit hors sujet, j’étais même très intéressé par ton avis sur ces deux bouquins.
[quote]Par exemple, la théorie des jeux suggère de bluffer / payer à la river en fonction de la côte du pot : si la mise (en limit) est à 10% du pot, il faut miser en bluff environ 10% du temps (et bien sur toujours lorsqu’on a une bonne main), de façon à ce que l’adversaire ne fasse pas de profit, qu’il paye tout le temps ou jamais. Cette théorie est optimale, dans le sens où quoi que fasse l’adversaire, on a maximisé 'espérance de gain entre les cas où on a la meilleure main, et les bluffs (s’il paye tout le temps, on est payé quand on a la mailleur main, s’il jette tout le temps, on gagne le pot en bluff de façon à équilibrer le gain, et ça s’équilibre aussi s’il paye un pourcentage du temps, et jette le reste)
Or en pratique, le fait de bluffer ou non va dépendre des tendances de l’adversaire à payer ou à jeter trop souvent. Donc en pratique, la théorie des jeux laisse de l’argent sur la table.[/quote]
A noter que le profiling peut (et doit) entrer en compte dans l’évaluation de la décision optimale. Sinon le calcul hors profiling est de toute facon intéressant à faire, c’est pour faire le bon ajustement que l’expérience va commencer à jouer un rôle très important.
Je vais demander a Stochastic (qui part aux Bahamas dans 3 jours pour un tournoi de Backgammon à 1 million de dollars) et à Jerome (qui est à New York pour le week-end) de venir apporter une petite contribution à ce poste. Après tout ce genre de reflexion c’est leur métier
Beaucoup de points dans ton posts. Je vais essayer d’y repondre dans l’ordre, en m’excusant pour le format, mais je suis sur un ordi de l’aeroport de JFK, dont je ne comprends pas toutes les subtilites.
Tout d’abord, lorsque tu ecris:
"Dans un post précédent, Jérome pose une question tirée d’un extrait de Mathematics of Poker, concernant une main en Omaha/high.
Je trouve que cette question est l’exemple type du problème que j’ai avec Sklansky, et donc Chen : c’est une analye basée sur des informations que l’on ne peut avoir, donc une réflexion mathématique utilisant les règles du poker, et non une réflexion de poker."
Ne t’inquiete pas, mon post a un but fort precis et extremement pratique. J’ai toujours ete le premier a critiquer Sklansky pour le manque d’application de beaucoup de ses articles…
« Par exemple, en Hold’em NL, supposons que vous ayez KK, et qu’il y ait une relance avant vous, vous décidez de surrelancer. Seulement, pas de chance, votre adversaire à AA. Avez-vous fait une erreur ? »
Dans Theory of Poker, il faut comprendre le terme « erreur » dans son sens restreint: on commet une erreur si on joue ses cartes differemment du cas ou l’on connaitrait toutes les mains en presence. Je ne dis pas que c’est juste, mais c’est comme cela que Sklansky definis « erreur » dans ce chapitre, de memoire.
« la notion d’erreur est définie par rapport à un résultat (la main que chaque joueur a effectivement), au lieu de l’être par rapport à la situation, i.e. les éléments maitrisés par le joueur (sa main, le board, la taille du pot, le style de l’adversaire => un ensemble de mains possibles) »
Dans ce passage, je retiens « un ensemble de mains possibles ». C’est la tout l’attrait de Mathematics of Poker, qui modelise le poker comme une bataille d’espace de mains possibles. Entre joueurs optimaux, les « erreurs » au sens de Sklansky seront commises parce que l’un des joueurs aura utilise la reaction correcte contre l’espace de main de son adversaire, mais se trouvera en « erreur » parceque la main de son adversaire se trouve a un point particulier de cet espace de main.
Pour reprendre un exemple simialaire au tien, tu as KK, et un joueur te relance all-in. pour 10 fois ta relance. Tu le connais asez pour savoir qu’il a soit QQ, KK, AA ou AK. Contre cet espace de main, il te faut payer (jeu optimal), pourtant, si il te montre AA, tu as fais une « erreur » au sens de Sklansky.
Au total, je dirais que MoP est tres superieur a ToP, tout en souffrant du meme defaut: ne pas offrir de passerelle pratique « evidente ». Je crois neanmoins que ce sont deux excellents ouvrages… Pour les eventuelles applications, j’espere que mon prochain post de PLO donnera une idee de comment appliquer ces belles constructions theoriques…