
Source : Club Poker
[quote]Version originale « My Son’s Gamble » de Lucy Ferriss publiée dans le New York Times le 24 juin 2009
En août dernier, je me suis levée à l’aube les yeux fatigués après une nuit mouvementée. Je suis alors descendue au rez de chaussée afin de me faire du café et d’allumer mon ordinateur. J’ai alors lancé internet et ouvert la page web de Full Tilt Poker, et j’ai téléchargé le logiciel afin de pouvoir jouer au Texas Hold’Em et d’autres jeux de casinos. Une fois le programme ouvert j’ai tenté de m’inscrire sous le pseudo de mon fil Dan, âgé de 18 ans, pseudo qu’il m’avait dit utilisé sur le site PokerStars. Comme je m’y attendais cela ne fonctionna pas.
Suivant le plan que je m’étais fixé plus tôt, j’ai ouvert la boîte mail de mon fils à l’université. Quelques semaines plus tôt, il avait en effet regardé ses emails sur mon ordinateur, et avait demandé à Firefox de garder son mot de passe en mémoire. Je me retrouvais donc en face de plusieurs mails des responsables de l’université, de son entraineur de tennis ou encore de ses professeurs. Mais le plus grand nombre provenait de Full Tilt et était adressé à un pseudo que je ne connaissais pas. Satisfaite de ma découverte, je ne lu aucun de ses messages. Je suis directement retourné sur Full Tilt et après avoir entré ce nouveau pseudo, j’ai clické sur l’icône : « Mot de passe oublié ». Pensant que mon rôle d’espionne allait s’arrêter au moment où le programme allait me poser la fameuse question de sécurité, je fus agréablement surprise lorsque le logiciel m’annonça que mon nouveau mot de passe venait de m’être envoyé sur ma boîte mail. Je saisis donc immédiatement le mot de passe dans le logiciel.
A partir de cet instant, mes mains se mirent à trembler. Je ne m’étais jamais infiltré dans la vie virtuelle de quelqu’un jusqu’ici, jamais volé un mot de passe. Mais devant l’urgence du moment, je passais outre ma morale.
Nous passions un très mauvais été. En prévision du retour de Dan à la maison, j’avais mise en place différentes règles de vie, qui je l’espérais pourrait nous aider à passer un meilleur été que l’année précédente, où ma vie de famille, fragilisée depuis mon divorce, avait failli éclater. Ces règles s’appliquaient à tous ceux vivant sous ce toit, imposaient d’avoir une activité ou un emploi, d’être discret la nuit en semaine, et d’avoir un comportement acceptable. Très vite, Dan a perdu ses privilèges concernant l’utilisation de la voiture, d’internet, et même le droit de vivre à la maison. Selon moi, la récalcitrance de mon fils était la source du problème. Il restait debout presque toutes les nuits et allait souvent se coucher au moment où le reste de la famille se levait. Il mangeait rarement avec nous, et n’avait aucune relation avec son grand frère ou mon compagnon, Donald, qui vivait avec nous depuis 2 ans. Il ne participait à aucune activité avec la famille. L’odeur pestitentielle qui émanait de sa chambre, à cause des tonnes de vêtements sales qui s’amassaient à l’intérieur de la pièce, envahissait l’escalier même lorsque la porte de son antre était fermée, ce qui était pratiquement toujours le cas. Dan passait une partie de son temps avec un groupe d’amis du lycée de plus en plus restreint. La plupart du temps il était sur son ordinateur. Il refusait de consulter un spécialiste que ce soit seul ou avec le reste de la famille.
Pour Dan, le problème venait de ma futile et étouffante volonté de le contrôler, insistant sur le fait qu’il avait un boulot, qu’il respectait mes horaires de coucher, et qu’il faisait semblant d’avoir une relation avec sa famille. Quand je l’ai mis à la porte, il est d’abord allé chez son père, qui ne partageait pas mes inquiétudes sur l’intérêt de son fils pour le poker. 36 heures après, Dan revenait à la maison, et son père m’appelait pour me dire : »Mon dieu, il est hors de contrôle ! ». Il avait du couper son accès internet.
Dan, après avoir passé la moitié de la nuit sur le banc d’un parc, avait accepté que j’installe un logiciel afin de limiter ses dépôts d’argent. J’avais fait des recherches afin de trouver un programme qui ne pouvait pas, normalement, être désactivé avant la fin du contrat. Dan accepta l’accord et rentra à la maison. 5 jours après avoir installé le logiciel, mon fils trouva un moyen de le retirer.
C’est ainsi que nous traversâmes le mois d’août. Dan a eu une première année universitaire moyenne, durant laquelle il a joué au tennis en première division et n’allait qu’aux cours obligatoires. Avec ce nouveau style de vie, où il ne vivait que la nuit, je ne voyais pas comment il pourrait continuer de cumuler les études et le sport durant l’automne. Je lui ai alors dit que s’il voulait retourner à la fac, il devrait arrêter le poker ou alors il devrait se financer lui-même. A mon grand étonnement, il m’a affirmé que durant tout ce temps il n’avait pas joué au poker. Il avait seulement regardé des vidéos de poker et des films.
« Toute la nuit ? » demandais-je, « Chaque nuit ? ». Il acquiesça, en me regardant droit dans les yeux. Prouve le moi, lui ai-je alors dit. « Montre-moi tous tes comptes : PokerStars, European Bank, American Bank ».
Il est allé chercher son ordinateur portable et m’a montré son compte sur PokerStars, où le compte était vide. Puis m’a montré son compte bancaire européen, une option pour les joueurs américains, car les banques américaines ne peuvent pas transférer de l’argent sur des sites de jeux d’argent, il était vide. Enfin son compte courant, était crédité de seulement 242 dollars.
J’étais stupéfaite. Je lui ai donc dit : « Je ne peux pas te demander de payer tes parties si tu n’as pas de sous. Ni te demander d’arrêter de jouer si tu ne joues pas. Mais je m’inquiète quand même de savoir comment tu vas pouvoir étudier ou aller aux entrainements avec ce rythme de vie ».
« Tu dois me faire confiance » m’a-t-il répondu.
Ce soir là, il a passé la soirée avec un ami. Vers minuit, je l’ai appelé et lui dit : « Ca ne s’arrange pas. Tu es encore dehors après minuit. Tu dépenses des sous en restaurant. Certains parents me disent que tu ne fais rien d’autres que jouer de l’argent chez eux ».
Il insista sur le fait qu’il m’avait montré tous ses comptes. Mais je lui ai rappelé que j’avais toujours des doutes et que j’étais bien déterminé à découvrir la vérité Après ce coup de fil, je n’ai pas réussi à trouver le sommeil. Sur les coups de 4h du matin, je me suis alors souvenu avoir entendu Dan et un de ses amis comparer PokerStars et Full Tilt Poker. Je me suis alors dit qu’il avait peut être un compte sur un autre site. Peut être que quelque part dans ses mails, je pourrais trouver la trace d’un compte Full Tilt. Je pourrais alors déjouer son bluff.
Me voilà alors, sous les premières lueurs du soleil, en train de m’enregistrer sur Full Tilt sous le pseudo de mon fils. J’ai clické sur « Mon compte ». Le compte affichait 12 000 dollars. Puis j’ai cliqué sur « Activités récentes ». Et là j’ai pu voir qu’il avait joué des centaines et de tournois et de cash games durant tout l’été. Suite à cela, je suis allé sur « Mes informations », et j’ai changé le mot de passe et l’adresse mail. Je me suis déconnecté puis je suis retourné sur la boîte mail de mon fils, et j’y ai effacé tous les mails de Full Tilt. Suite à cela je suis montré tremblante à l’étage, raconter à mon conjoint, Donald, ce que je venais de faire.
Dan a toujours aimé les jeux. Dès la maternelle, il a été bercé par Mario Bros. Il s’inventait des compétitions avec Mario et Luigi qu’il appelait « Les Widgies ». Quand il n’avait pas envie de faire la sieste à la maternelle, le professeur d’informatique l’amenait avec lui et il passait l’heure à jouer sur l’ordinateur. Plus tard, à la maison il a découvert le Monopoly. Quand tout le monde en avait marre de jouer, lui il continuait et jouer en tête à tête contre un adversaire imaginaire. A 6 ans, il a découvert le basketball. Il s’est mis à traîner sur le terrain en face de chez nous, et organisait des concours de lancer francs avec des gamins plus vieux que lui. Si personne ne voulait jouer, il s’imaginait être Michael Jordan et Dennis Rodman et jouait en 1 contre 1 contre lui-même. En 4ème, il voyait l’école comme une compétition qu’il voulait remporter.
De plus, Dan a toujours été un athlète doué. Il faisait du basket et du tennis, et faisait toujours en sorte d’être le meilleur et ramener les trophées à la maison. Au final, il a remporté le titre de joueur de l’année. Même si le tennis le détournait de ses concours d’entrée à l’université, les qualités physique et la confiance que cela lui accordait, rassurait un peu mes inquiétudes maternelles.
Lorsqu’il ne jouait pas au tennis, Dan jouait aux cartes avec ses amis. Ils furent pris par la vague nationale lancée par les retransmissions télévisées des World Series of Poker et l’élévation des joueurs de poker au rang de stars. Certains parents étaient inquiets des parties de Texas Hold’Em No limit, au buy-in de 5$ qui avaient lieu dans différents sous sols du quartier, dont le mien. Je répondais aux sceptiques, en leur disant que j’étais content de voir les garçons faire autre chose que de regarder la télé.
C’est moi qui ai enseigné à Dan son premier jeu d’argent : le blackjack. A l’époque où il apprenait l’arithmétique, on avait un pot rempli de centimes dans la cuisine. Et un jour j’ai demandé à Dan et à son frère si ils voulaient apprendre un jeu où ils pourraient compter jusqu’à 21, et si ils gagnaient ils remportaient les centimes de leurs adversaires. En très peu de temps, Dan a gagné toutes les pièces du pot.
L’Université Old Dominion en Virginie, n’était pas le 1er choix de Dan. Bien que beaucoup d’écoles, étaient intéressées par ses qualités tennistiques et ses résultats aux tests d’aptitudes, mais elles ont toutes bloquées sur ses notes. Old Communion, une fac de la banlieue de Norfolk avec une très bonne équipe de tennis, était intéressée par son profil. Selon moi, Dan semblait vouloir aller à l’université pour de mauvaises raisons. Il n’était intéressé par aucune matière. Il voulait juste quitter la maison et suivre la même voie que ses coéquipiers. Mais lorsque Dan a refusé de considérer l’éventualité d’une année de transition dans une prestigieuse académie de tennis, je lui ai suggéré de faire un prêt personnel du montant de la bourse que lui aurait accordé Old Communion s’il avait eu de meilleures notes. S’il finissait l’année avec de bons résultats, je lui rembourserais le prêt.
En avril, après un premier semestre assez difficile, Dan a été suspendu de son équipe de tennis pour avoir raté plusieurs cours. Il n’était pas heureux à l’école. Bien qu’il ait réussi à améliorer ses notes de telle manière à ce que je lui rembourse le prêt, il m’a dit qu’il souhaitait être transféré dans une faculté où il pourrait se sentir bien. Mais lorsque le mois de mai est arrivé, il était clair qu’il n’avait pas le temps de préparer son transfert. Il était trop occupé par sa nouvelle activité qui avait remplacé le tennis : le poker sur internet.
Après avoir modifié le compte de Dan, j’ai passé la journée à culpabiliser. J’essayais de me rappeler que quelqu’un devait mettre mon fils face à ses responsabilités et la seule personne à pouvoir le faire c’est moi. Cependant, en cette chaude après midi, j’attendais nerveusement un signe qui me montrerait qu’il était levé, qu’il essayait de se connecter, et qu’il était en train de découvrir que son compte était bloqué. Puis finalement, vers 174h, trois de mes amis sont venus me chercher pour aller à une compétition de danse dans la région de Berkshires. Alors que nous étions en train de charger le coffre, Dan a déboulé en dehors de la maison en hurlant : « Rendez le moi ! Rendez-moi mon argent ! ».
« Je n’ai pas ton argent » lui ai-je alors répondu.
Il m’a alors traité de tous les noms. Je lui ai dit que nous discuterions plus tard. J’ai invité mes amis à monter dans la voiture. Alors que je me mettais derrière le volant, et démarrait la voiture, Dan a arraché l’essuie glace arrière et a tapé sur le toit de la voiture avec. Puis il s’est placé derrière la voiture au moment où je commençais à reculer et a crié : « Vas y tue ton fils ! »
Grâce à une manœuvre habile, j’ai réussi à sortir la voiture tout en évitant Dan. Mes amis étaient sous le choc. L’une d’elle, une psychologue, m’a dit calmement : « Ton fils ne serait pas accroc, par hasard ? ».
La question de l’addiction m’avait traversé l’esprit plusieurs fois déjà depuis que Dan jouait régulièrement au poker. Il s’est toujours investi à fond dans ce qu’il faisait. Quand il était petit, son grand père l’appelait : Monsieur Concentré. Quelques années plus tard, lorsque j’ai annoncé mon soulagement que mon fils aille bien et ne prenne pas de médicament, un conseiller familial m’a dit que le tennis était la drogue de Dan.
Après le démantèlement de ma piteuse tentative de hacker l’ordinateur de Dan, lui et moi avons du négocier même si ce ne fut pas facile. Il avait réussi à persuader Full Tilt de restaurer son compte. Nous avons réglé le problème de son retour à la fac en décidant qu’il utiliserait une partie de ses gains pour payer ses cours jusqu’à qu’il arrive à prouver qu’il peut gérer de front les cours, le tennis et le poker. Il est donc retourner en Virginie et moi j’ai continué à chercher des réponses.
J’ai commencé mes recherches en allant sur des forums d’accrocs au jeu et des groupes de soutien comme Gam-Anon. Au début, le modèle d’addiction qu’il décrivait m’a paru censé : ils développaient une notion expliquant que le jeu pouvait déclencher un stimulus cérébral comparable à la prise de cocaïne, ce qui pouvait expliquer la réaction agressive de Dan lorsque j’ai clôturé son compte.
Mais lorsque j’ai consulté, le très connu South Oaks Gambling Screen (SOGS), ce qui me semblait clair m’est apparu beaucoup plus confus. J’essayais d’imaginer les réponses que Dan aurait pu donner aux différentes questions de ce test : question 11 : « Avez-vous déjà caché des reçus de paris, des billets de loteries ou autres signes de jeux d’argent à votre entourage ? ( Oui, car elle compare le poker avec les autres jeux d’argent) ; question 15 « Avez-vous déjà laissé les paris prendre le pas sur votre travail ou vos études ? ( J’ai mis l’école de côté car cette école n’est pas faite pour moi).
Il aurait probablement était catalogué comme joueur pathologique suite à ce test. Mais selon moi, ces questions ne conviennent pas à la situation de Dan. Les autres questions (Avez-vous déjà emprunté de l’argent à quelqu’un, argent que vous n’avez pas pu rembourser à cause du jeu ?) ne correspondaient à la situation d’un joueur gagnant de l’argent.
Durant sa 2ème année universitaire, Dan a perdu beaucoup de choses autre que de l’argent. Ses notes ont encore dégringolé. Après avoir été réintégré dans l’équipe de tennis, il décida de la quitter définitivement quelques mois plus tard. Cependant, il continuait de gagner au poker, jusqu’à amasser une bankroll suffisante pour partir à Aruba avec un ami, et avoir encore assez pour se payer une voiture, subvenir à ses besoins et commencer une vie faite de voyages à travers le monde. Depuis qu’être un athlète universitaire ne l’intéressait plus, ses notes et ses prouesses physiques n’avaient plus aucun intérêt pour Dan. En février, après avoir payé ses frais de scolarité, il prit le choix, tardif, mais judicieux de quitter la fac. Etaient ce toujours les décisions d’un accroc au jeu, maintenant qu’il se considérait comme un joueur de poker professionnel ?
Pour moi, c’était une question sensible. Entraînée dans un face-à-face avec le camp des accrocs du jeu, il fallait que je trouve un moyen de justifier la conduite de mon fils ou que je mette sur pied un plan de sauvetage à grande échelle. J’ai donc fait ce que tout professeur digne de ce nom et déchiré intérieurement devait faire : je suis allé à la bibliothèque. Et j’y ai appris beaucoup de choses.
Par exemple, j’ai appris que ce que je considérais comme la question addiction-ou-profession (que d’aucuns pourraient aussi appeler la question hasard-ou-habileté) est aussi débattue en ce moment devant les institutions législatives et judiciaires américaines, notamment vis-à-vis d’une loi de 2006 sur les paris en ligne illégaux, le Unlawful Internet Gambling Enforcement Act ou UIGEA. L’UIGEA interdit les sites de paris en ligne d’accepter de l’argent pour des paris « illégaux ». Cependant, ce terme est à peu près aussi clair que de la vase, la définition de « pari illégal » variant selon les législations des Etats. Un enjeu majeur pour beaucoup d’opposants au UIGEA – c’est-à-dire la plupart des joueurs de poker – est le recours par certains Etats au « test du facteur dominant », selon lequel le hasard doit primer sur l’habileté pour qu’un jeu soit considéré comme un pari. Selon les termes employés dans un article que j’ai lu, si « le poker est un jeu d’habileté et donc pas un jeu de hasard », les sites de jeu en ligne seraient libres d’accueillir des clients américains.
Alors, mon cerveau s’est mis en marche : si le poker est un jeu dans lequel l’habileté prédomine – comme les échecs ou le Scrabble – alors, ce n’est pas « juste parier ». Peut-être que ça aiguise réellement l’esprit, comme l’a soutenu Charles R. Nesson, un professeur de droit à Harvard, en présentant le jeu comme « un environnement pour expérimenter les dynamiques de la stratégie ». Mon fils ne serait pas aspiré par un jeu de hasard à somme nulle addictif qui n’apporterait rien à la société, il bénéficierait d’une forme de divertissement stimulante pour laquelle d’autres adultes rationnels sont prêts à payer.
Les études associant le jeu en ligne compulsif aux troubles de la personnalité, à la toxicomanie ou à d’autres comportements criminels à risques venaient cependant contrer cet habile raisonnement. Même Charles Humphrey, un expert en droit du poker qui a assisté l’Alliance des Joueurs de Poker dans ses efforts pour que la loi soit rappelée, reconnaît la part de hasard intrinsèque au jeu de poker quand il observe que personne n’a jamais remporté le titre de Joueur de Poker de l’Année deux ans consécutifs. « D’ailleurs, écrit-il, peu sont ceux qui figurent dans le Top 10 d’une année sur l’autre ».
J’ai contacté Keith Whyte, directeur exécutif du Conseil National sur les Problèmes liés aux Jeux de Hasard. Je lui ai dit que je cherchais des réponses – et aussitôt, il m’en fournit une. « Le poker est un jeu de hasard » a-t-il dit platement. « On y trouve les trois mêmes choses qu’on trouve dans tous les jeux de hasard : un prix, de la chance et de la rétribution ». De plus, j’ai appris en effeuillant le Journal sur les Etudes liées aux Jeux de Hasard que la plupart d’entre nous a tendance à risquer plus sur le sort d’un jeu de hasard quand celui requiert seulement une pincée d’habileté – ce qui n’est pas une mauvaise description du poker.
Longtemps après que Dan ait quitté l’école, je restai éveillée des nuits entières en pensant à la vie qu’il avait choisie – une vie qui le faisait passer d’athlète vigoureux à pale ectomorphe, dans laquelle la vie sociale ne serait que sporadique et souvent virtuelle, dans laquelle la possibilité d’une éducation libérale était peut-être perdue à jamais, dans laquelle une relation amoureuse stable (sans même parler d’une famille) serait extrêmement difficile à maintenir, dans laquelle il vivrait à l’écart d’une société fondée sur le travail, le salaire et les autres aspects du contrat social. Je priais pour qu’il gagne assez pour arrêter, ou pour qu’il perde assez pour arrêter ; pour qu’il se lasse et arrête.[/quote]

